Cinquante jours après le début de l’entreprise, une offensive générale, dépassant en ampleur celle de février, s’est déclenchée sur tout le front, une ligne d’environ 25 kilomètres, c’est-à-dire comparable à celle de la bataille de Champagne
Une attaque allemande contre Haucourt avait été repoussée le 4 avril. Une nouvelle tentative se prolongea toute la nuit sur le secteur compris entre Avocourt et Béthincourt. L’ennemi lança de très gros effectifs. Les assauts contre Béthincourt furent arrêtés par les feux des poilus, malgré l’acharnement des bataillons jetés sur le village. Au centre de la ligne de combat, Haucourt était plus violemment attaqué. Au milieu de la nuit l’ennemi parvenait à prendre pied dans les ruines du village.
Du côté d’Avocourt, l’initiative de la lutte revenait aux poilus. Les attaques reprirent vendredi avec une fureur nouvelle. Un puissant assaut fut tenté ; mais il suffit de nos canons et de nos mitrailleuses pour briser les masses ennemies. Pendant ce combat, les obus allemands couvraient le Mort-Homme et Cumières.
La tentative se renouvela dans la nuit sur le même front; des attaques répétées échouèrent. Deux petits ouvrages nous furent cependant enlevés.
Notre commandement prévoyait la grande offensive qui allait se déclencher le lendemain dimanche, avec des moyens d’action tels que l’ennemi escomptait déjà le succès. Dans la nuit, le saillant formé par Béthincourt en avant de nos lignes était évacué sans que les Allemands eussent paru s’en douter.( … ) Les assaillants se présentèrent en formations épaisses, offrant une prise à nos rafales d’obus et de balles de mitrailleuses. Après des efforts aussi vains que répétés, les Allemands durent se replier, laissant le terrain couvert de centaines de cadavres.
Ils subirent dans ce secteur leurs pertes les plus importantes. ( … ] La journée était donc un échec pour l’ennemi. À la nuit, une nouvelle attaque contre Le Mort-Homme permit aux Allemands de pénétrer sur une longueur de 500 mètres dans notre ligne la plus avancée, au prix de lourdes pertes.
Le 6 avril, un bombardement intense était dirigé sur nos lignes, prélude d’une attaque d’infanterie que l’on attendait très forte. Mais notre canon intervint avec tant de précision que l’ennemi ne se risqua pas hors de ses abris. Il se tint alors tranquille jusqu’au 9. [ … ] La bataille tentée à la Côte du Poivre s’étendit alors jusqu’aux abords de Vaux ; nulle part l’ennemi ne put déboucher.[ … ]
L’ennemi n’avait pas renoncé à enlever Douaumont, le bois de la Caillette et les abords de Vaux. Mardi, il reprenait le bombardement avec une vigueur nouvelle, faisant suivre la pluie d’obus géants de furieuses rafales d’obus lacrymogènes ou asphyxiants.
Supposant alors nos tranchées abandonnées ou remplies seulement de mourants, il lançait une forte attaque, depuis Douaumont jusqu’à Vaux. Quelques boyaux furent envahis, mais une contre-attaque immédiate chassait les Allemands qui laissaient entre nos mains une centaine de prisonniers.
10 avril 1916. Célèbre ordre du jour du général Pétain. « Le 9 avril est une journée glorieuse pour nos armes. Les assauts furieux des soldats du Kronprinz ont été partout brisés. Fantassins, artilleurs, sapeurs, aviateurs de la 2e armée ont rivalisé d’héroïsme. Honneur à tous. Les Allemands attaqueront sans doute encore. Que chacun travaille et veille pour obtenir le même succès qu’hier. Courage, on les aura ! ».