Les fouilles de Pompéi

1748
Début des excavations de Pompéi sous la direction de Joaquin de Alcubierre. Celui-ci pense d’abord qu’il s’agit de l’antique cité de Stabies.
1806-1815
L’occupation française du royaume de Naples entraîne une intensification des excavations de Pompéi, notamment dans la zone du forum.
1860-1875
Giuseppe Fiorelli dirige les fouilles. Il a recours à des méthodes modernes pour préserver les édifices et réalise des moules avec les corps retrouvés.
1924-1945
Le gouvernement fasciste augmente les fonds alloués aux excavations menées par Amedeo Maiuri. Découverte de la villa des Mystères.

Pompéi… De plus en plus chaud

En 2002, On en sait un peu plus sur les moeurs de la cité antique, grâce à la série de fresques visibles dans des thermes enfin restaurés après leur fermeture… dans les années 1950. Seize fresques en tout, dont sept se dévoilent aujourd’hui, laissant plus qu’entrevoir une Pompéi polissonne. La vie sexuelle des Romains se trouve ainsi détaillée de manière particulièrement explicite, même si, aux yeux des archéologues et des historiens, rien ne prouve que ces thermes souterrains aient fait office de maison de passe. L’année dernière, le débat sur les « comportements dépravés» de la cité s’était déjà nourri d’une exposition au Musée archéologique de Naples présentant 250 pièces érotiques (peintures, sculptures, mosaïques…), extraites des fouilles menées à Pompéi et à Herculanum. Des tableaux et des objets qui, d’une manière générale, n’étaient dévoilés ni au public, ni même aux épouses, puisque situés à l’abri des cuniculi, les chambres des maîtres de maison, voire dans les lupanars,un commerce bien présent à Pompéi puisque 35 de ces «lieux de plaisirs » ont été recensés dans la cité, pour une population de 12000 habitants. De là à présenter Pompéi la débauchée comme une ville scandaleuse, il n’y a qu’un pas que certaines agences de tourisme se sont empressées de franchir allègrement, au mépris, il faut bien le dire, de la rigueur historique.

Les nombreuses inscriptions déchiffrées sur les murs de la ville nous informent des plus petits détails de la vie : location ou vente de maison, annonce pour retrouver une bête perdue, publicité, spectacles, affichage électoral… Parfois, ce sont les habitués des lupanars qui ont laissé quelque sentence obscène, des aubergistes qui ont dressé leurs comptes sur le mur, des écoliers qui ont transcrit leurs exercices ou bien un rêve d’amoureux éternisé dans une formule brève.

L'oeuvre de Fiorelli

Les cadavres de Pompéi que les cendres ont conservés sont enduits de plâtre liquide

Dès l’arrivée de Fiorelli vers 1861, les fouilles s’accélèrent et surtout s’organisent. Pour ne plus faire une véritable escalade de la visite d’une maison exhumée, Fiorelli fait emmener les déblais par wagonnets. Pour ne plus risquer de provoquer l’écroulement des bâtiments en commençant par les rues, Fiorelli dégage d’abord les bâtiments et. de ces bâtiments. d’abord le toit.
Jusqu’alors excavés au petit bonheur, les édifices émergeaient çà et là d’une mer de cendres : Fiorelli décide de les relier entre eux et, à cet effet, selon un système à peine modifié de nos jours, il dresse un plan probable des rues et ruelles, qu’il découpe en régions et îlots, après avoir donné à chaque boutique, à chaque maison un numéro d’identification.
Grâce à son insistance, les fresques ne sont plus envoyées au musée de Naples, mais restent sur place. Enfin, c’est à lui qu’on doit la technique du moulage au plâtre : les cadavres que les cendres ont conservés sont enduits de plâtre liquide et laissés trois jours à sécher, gardant ainsi à jamais l’attitude et l’expression des agonisants. Mais, surtout, il fit d’importantes découvertes.
Jusqu’ici on avait plutôt fouillé à l’ouest. Lui porta ses efforts à l’est. Il exhume le lupanar Où l’on retrouve, bien conservée dans une marmite. une sorte de cassoulet aux haricots et aux oignons qui mijotait au moment de l’éruption ; il exhume la boulangerie de la rue des Augustales dans le four de laquelle on retrouva pareillement quatre-vingt-un pains évidemment carbonisés, mais toujours intacts ; il met au jour la maison du banquier Caecilius Jucundus dont les apochae, ou quittances. jetèrent un jour inattendu sur la vie économique de Pompéi .

Un archéologue inspiré; Amedeo Maiuri

Des archéologues inspirés à PompéiLes premiers successeurs de Fiorelli poursuivirent son œuvre. Avec la découverte de lamaison dite a des Vettii en 1894-1855, le rêve d’une présentation complète d’une habitation, restaurée et dotée d’une couverture, se matérialisait. Mais l’émoi de la mise au jour de cette étonnante demeure aux peintures d’une rare qualité fut rapidement terni par le développement des fouilles autour de la ville. Aux mains des propriétaires des terrains concernés, ces explorations de villas conduisirent à la vente d’objets à des musées aussi prestigieux que le Louvre eu le Metropolitan Museum de New York, au grand dam de la jeune nation italienne.
Autour de la première guerre mondiale, une nouvelle direction fut donnée : Vittorio Spinazzola obtint du gouvernement des fonds extraordinaires pour relier le centre de la ville à l’amphithéâtre. Seules les façades étaient mises au jour, sauf en cas de découverte extraordinaire. Il conduisit ainsi des travaux pionniers concernant l’architecture des rues.
En 1924 on nomme à la tête des fouilles un archéologue aussi inspiré que compétent, Amedeo Maiuri. Pendant quarante ans, que ne lui devra pas Pompéï ! Il commence par un coup de maître, exhumant la maison de P. Cornelius Tagès, le Trimalcion local, où il découvre, emmaillotée dans un linge, la fameuse statue l’Éphèbe, copie d’un original grec du Ve siècle av. J.-C.
Peu de temps après, nouveau triomphe : il met au jour une demeure aux décorations uniques, véritable villa dans la ville, qu’il surnomme la maison de Ménandre pour l’admirable peinture du poète qui orne l’un des murs, et où plus tard, comme pour celui de Boscoreale, un trésor d’argenterie sera retrouvé fortuitement par un ouvrier curieux.
Maiuri continue les fouilles autour de la rue de l’Abondance, découvrant à l’intérieur de certaines demeures des objets souvent remarquables, comme cette statue en ivoire d’une déesse indienne, montrant par là que Pompéi entretenait des relations commerciales jusqu’en Asie. En 1929-1930, il dégage la villa des Mystères. En 1935, il découvre la grande palestre où, depuis Auguste, la jeunesse s’entraînait au sport, mais aussi aux armes.
Ses travaux autour de la muraille septentrionale permettent d’apprécier le système de défense de la ville, à base de courtines et de tours ; de même que sa découverte près de la porte du Vésuve d’un puits antique, comme son étude minutieuse du grand château voisin lèvent tout doute sur la façon dont fonctionnait le service hydraulique de la ville, et notamment son circuit d’eau courante.
Enfin, en procédant à certains déblaiements près du grand théâtre, il révèle un des aspects les plus typiques, mais jusqu’alors méconnu, de Pompéi : sa physionomie de ville étagée, dont les maisons à flanc de colline descendaient en terrasses panoramiques face aux monts Lattarii, accusant entre autres, de la porte de Stabies au sud, à la porte du Vésuve au nord, une dénivellation de plus de trente-cinq mètres.

Un bombardement désastreux

Le bombardement de Pompéi par les forces alliées pendant la nuit du 24 août 1943Étendant les idées initialement conçues par Fiorelli, Maiuri transforma la ville en un vaste musée à l’air libre, chaque boutique, chaque maison accueillant les objets susceptibles d’avoir été trouvés en leur sein. Chacun prendra la mesure du choc que fut le bombardement de Pompéi par les forces alliées pendant la nuit du 24 août 1943, triste anniversaire de ce que l’on croyait alors être la date de l’éruption, puis de nouveau entre le 13 et le 15 septembre de la même année Le musée du site et de nombreuses maisons furent irrémédiablement détruits. Passées les restaurations, les fouilles reprirent après-guerre.
Maiuri découvre, en 1954, la porte de Nocera, avec tous ces groupes de cadavres et, au-delà de la porte, sur une autre voie des Sépulcres, le tombeau de la belle et richissime Eumachia. patronne de l’importante corporation pompéienne des foulons.
Excavé, l’ultime tronçon de la rue de bondance révèle l’existence de nobles demeures, dont l’une, pour le bassin de son atrium, fut dite du Bel Impluvium, et une deuxième, pour ses peintures de fruits, du Verger. Une troisième, dont le triclinium, ou salle à manger, s’orne d’une admirable fresque de Vénus flottant sur l’onde dans une conque escortée par deux Amours, fut naturellement appelée la Maison de Vénus.
En 1952-1953, la villa de Julia Felix est redécouverte. On se rappelle qu’elle avait déjà été exhumée au XVIIIe siècle, puis ensevelie de nouveau quand on l’eut vidée de ses trésors. L’enlèvement des déblais qui, près du Grand Théâtre, avait, sur un petit espace, permis de restituer à Pompéi son caractère de ville étagée, est poursuivi sur tout le front méridional de la région VIII, dont les maisons ont donc maintenant retrouvé leur magnifique panorama de jadis. Finalement, lorsque Maiuri meurt, sur les soixante-dix hectares que compte le pomerium, ou périmètre de la ville, il n’en reste plus à fouiller que vingt-six.
Depuis le début des années 1960, la surface des véritables dégagements e été considérablement réduite, mais a permis de mettre au jour des maisons construites en terrasse ou certaines damas du centre de la ville. La recherche scientifique est désormais davantage tournée vers les fouilles de Pompéi e avant Pompéi », particulièrement développées dans les années 1995-2008. Tant que les espaces déjà dégagés n’auront pas été intégralement étudiés et publiés, il serait criminel de procéder à de nouvelles fouilles, et ce d’autant plus que la pression touristique tend à accélérer la dégradation du site.

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