La naissance du Ku Klux Klan en 1865
En 1865, l’abolition de l’esclavage et l’octroi du droit de vote aux Noirs provoquent la fureur des Blancs du Sud. Le 6 mai 1866, un petit groupe d’anciens officiers confédérés met sur pied le Ku Klux Klan, une organisation destinée à terroriser les gens de couleur. Commencent alors des défilés nocturnes à cheval, les hommes vêtus tout de blanc, portant de longues tuniques et de grandes cagoules qui dissimulent les visages.
1865
Le 24 décembre, dans le Tennessee, a lieu la première réunion du Ku Klux Klan.
1869
Dissolution solennelle du KKK par son chef, le général Nathan Bedford Forrest. Un moyen de rendre ses activités plus secrètes.
1915
Succès du film Naissance d’une nation de D. W. Griffith où le réalisateur prend parti pour le KKK.
1920
Nouvel élan du KKK avec le journaliste Edward Clarke et la riche veuve Elizabeth Tyler.
1944
Endetté de 685000 dollars, le Klan disparaît « officiellement » pour la seconde fois
Naissance du Ku Klux Klan à Pulaski
Nous sommes en 1865. Dans un Sud défait, rongé par le chômage et la misère, les jeunes vétérans de la Confédération cherchent à tromper l’ennui. Le 24 décembre, à Pulaski, obscur chef-lieu du Tennessee, six d’entre eux (Jones. McCord. Reed, Kennedy. Lester, et Crowe) se réunissent pour fonder une association. Rien de politique, il s’agit seulement de prolonger la fraternité d’armes.
Respectant la tradition des clubs d’étudiants, les camarades baptisent la communauté d’un nom auréolé de mystère. Ancien du Centre Collège du Kentucky. Kennedy fait adopter le mot grec kuklos signifiant cercle, Crowe le scinde en deux et en change la finale, obtenant Ku Klux, observant que les fondateurs sont d’ascendance écossaise. Lester propose d’y ajouter une évocation du clan en l’harmonisant à l’orthographe générale. Crowe trouve amusante l’idée de déguiser les membres, ainsi que leurs chevaux, avec les draps et les taies raflés dans la maison d’un de leurs hôtes. Le Ku Klux Klan (KKK) vient de naître.
Le but est de s'amuser à effrayer les Noirs
Ce qui a commencé comme une farce va bientôt changer de nature. Les parades masquées, emmenées par les six compères, ont comme but de terroriser les Noirs, dénués d’instruction et superstitieux, persuadés de croiser les fantômes de confédérés morts au combat.
Instrumentaliser la peur en l’au-delà, voilà l’occasion inespérée, pour les Sudistes appauvris, de remettre au travail dans les plantations les quatre millions de Noirs que Lincoln a affranchis par la Proclamation d’émancipation du 1er janvier 1863 !
Il n’en faut pas davantage aux encagoulés pour poursuivre leur mascarade. Sous prétexte de maintien de l’ordre, ils s’amusent à effrayer les Noirs en employant divers dispositifs destinés à accréditer la réalité de leurs pouvoirs surnaturels: os de squelette dissimulé sous le drap pour serrer la main des anciens esclaves ahuris, courge habilement masquée puis soudainement retirée, évocation de la légende du cavalier sans tête.
Le Ku Klux Klan devient un empire invisible
Dans ce contexte, le Klan allait littéralement éclater. D’abord, on recruta dans la ville d’Athens, voisine de Pulaski. Puis dans d’autres villes, dans d’autres villages. Un an plus tard, en janvier 1867, les premier congrès du Klan se tenait à Nashville, capitale du Tennessee. Au fil des mois, le Klan s’était découvert une philosophie, il avait affirmé ses principes. Donc, il voulait lutter pour la pureté : la pureté de la tradition, la pureté du foyer, celle de la famille, celle de la race blanche. Or, tout cela était menacé par l’incroyable audace des Nègres. Lutter pour remettre les Nègres à leur place, c’était donc lutter pour la pureté.
Le membre du Ku Klux Klan se tenait pour le chevalier d’un ordre. Il partait en croisade pour reconquérir le royaume perdu. C’est ainsi que, presque fatalement, le Klan reçut une forme féodale.
La règle essentielle : le Klan restait un mouvement clandestin. De là, les États du Sud, sur lesquels il étendait son emprise, formaient un Invisible Empire, gouverné par un Grand Sorcier. Il était divisé en États, appelés Royaumes, dirigés par des Grands Dragons. Les Royaumes étaient eux-mêmes divisés en Dominions où régnaient les Grands Titans. Les Grands Cyclopes, eux, exerçaient leur autorité sur les Comtés ou Cavernes.
Le rite d'initiation du Ku Klux Klan
Sur cette force indiscutable, qui allait régner ? Qui serait Grand Sorcier ?
Le général Lee, ancien chef des armées du Sud, se déroba. En revanche, le général Forrest accepta sans se faire prier. C’était un soldat courageux, il avait eu quinze chevaux tués sous lui. Mais, avant la guerre, il avait été marchand d’esclaves, à Memphis. Prédestination. Pendant la guerre, il avait fait tuer tous les soldats noirs qui s’étaient rendus à Fort Pillow, aux cris de Tuez les négros.
Ce fut donc sous le règne du général Forrest que fut mis au point le rite d’initiation. Denis Baldensperger, dans un ouvrage d’une grande puissance d’évocation, a relaté l’introduction des nouveaux postulants au sein de la confrérie.
On choisissait généralement une maison en ruines dans un lieu écarté.
« Dans un silence épais, rempli pourtant d’invisibles présences, le postulant avance seul à la rencontre de l’habitation fantomatique. Tout à coup, un sifflement interrompt ses pas, une main brutale s’abat sur lui, lui bande les yeux en un tournemain et le pousse à nouveau en avant. » Devant la maison, il est arrêté par une voix puissante qui clame :
Qui es-tu?
Quand le postulant a répondu, il subit toute une litanie de questions : est-il bon citoyen, opposé aux principes du parti radical ? Est-il américain de naissance ? Est-il bon chrétien ? De sang anglo-saxon ? Est-il contre l’égalité des Nègres ? Pour un gouvernement blanc ?
Si, à toutes ces questions, le postulant a répondu affirmativement, il est admis. On le revêt du vêtement royal, il peut ceindre le ceinturon sacré. Il doit alors répéter la formule du serment :
Moi, un tel, devant Dieu Tout-Puissant, jure solennellement que je ne révélerai par déclaration, signe, symbole, acte ou parole ou de toute autre manière aucun des secrets, signes, étreintes, mots de passe, mystères ou propos et ne ferai savoir à quiconque que j’en suis membre.
On le prévient que s’il viole son serment, il
encourra une seule peine : la mort.
