Au bas des marches, un mur de pierre couvert d’un enduit frappé aux sceaux de la nécropole. 0ui, mais Carnavon s’aperçoit que la tombe a été ouverte durant l’Antiquité et refermée peu après. Dans quel état est-elle réellement? Dans te couloir, après la porte, un linge contenant des bijoux : les pillards ont dû être surpris. Et puis, dans la première salle, un amoncellement de meubles: lits, coffres, boîtes contenant des offrandes, chars démontés. Des pillards sont bien passés ici, mais ils n’ont pas eu le temps de commettre l’irréparable
Mort d’un Dieu
Les hypothèses sur la mort prématurée de Toutankhamon sont nombreuses, mais
la vérité reste un mystère
Assassiné par son successeur
La présence d’un eclat d’os dans la cavité craniennea fait penser que Toutankhamon est mort d’une hémorragie méningée causée par un coup à la tête. Des analyses récentes discréditent cette théorie.
Malaria
Une analyse ADN a montré que la malaria était présente dans le système sanguin de Toutankhamon, laissant penser que la maladie a pu remporter_ Si la malaria peut être mortelle.. les adultes développent souvent une immunité, ce qui laisse des doutes sur cette théorie.
Accident de char
Un côté du corps de Toutankhamon comportait de nombreuses blessures. Des experts en accidents automobiles pensent que ces blessures pourraient correspondre à un accident de char qui aurait brisé le pelvis et les côtes. Il fut cependant démontré que ces blessures sont survenues après la mort.
Maladies génétiques
Plusieurs maladies génétiques sont attribuées à la mort de Toutankhamon, dont une épilepsie du lobe temporal. Les experts pensent qu’une épilepsie a causé une chute fatale qui lui a brisé la jambe qui s’est ensuite infectée.
Carter mourait d’impatience et maudissait la lenteur des bateaux. Une tombe inviolée l’attendait dans la Vallée, et lui piétinait sur le quai de la gare de Louxor !
La joie contenue de Carnarvon et le sourire de Lady Evelyn, enthousiaste à l’idée de vivre la plus fabuleuse des aventures, effacèrent les journées perdues . Traversée du Channel, chemin de ferà vers la France, nouvelle traversée de Marseille à Alexandrie, nouveau chemin de fer d’Alexandrie au Caire puis du Caire à Louxor, le comte n’était pas au terme de ses épreuves. Il lui fallut encore prendre le bac entre la rive est et la rive ouest du Nil, après avoir reçu les salutations di’ gouverneur de la province venu l’accueillir, puis grimper sur le dos d’un âne et cheminer vers la Vallée des Rois au rythme du grison.
Chapeau gris à bordure blanche, épais manteau à double rang de boutons, écharpe de laine, Carnarvon, fatigué et frileux, ne parvenait pas à se réchauffer. Sa fille, radieuse, portait un ensemble beige clair ; un col de fourrure rappelait les froidures européennes et la jupe très sage, boutonnée sur le côté, l’obligatoire maintien d’une jeune femme de l’establishment.
Le 20 novembre, lord Carnarvon arriva accompagné de sa fille lady Evelyn Herbert, qui était sa fidèle compagne dans ses expéditions d’égyptologue. Tout était prêt pour que commençât le second chapitre de la découverte du tombeau.
Dans l’après-midi du 24, les seize marches de l’escalier avaient été complètement dégagées, et nous pûmes examiner attentivement les sceaux de la porte. Les empreintes étaient plus distinctes dans la partie inférieure et nous avons pu lire en plusieurs endroits le nom de Toutankhamon.
Cela accrut extraordinairement l’intérêt de la découverte ; si comme tout le laissait croire nous avions trouvé le tombeau de ce mystérieux monarque dont le règne a coïncidé avec la période la plus intéressante de l’histoire égyptienne, nous avions bien des raisons de nous réjouir.
Les jours suivants, il fallut enlever la porte scellée et Callender fit faire une lourde grille de bois pour la remplacer.
Le 25 novembre au matin Carter, lord Carnarvon, lady Evelyn et Calender descendent ensemble, pour la première fois, les seize marches qui mènent à l’entrée du tombeau de Toutankhamon. Il ne faut pas moins d’une journée entière pour déblayer le terrain. Le 26 novembre enfin, on arrive devant une deuxième porte.
Les mains de Carter tremblent en prenant une tige de fer pour percer encore un trou dans la porte. Carter élargit la brèche, y passe la lampe électrique et colle un œil dans le trou. Ses compagnons l’entendent bredouiller des paroles inintelligibles. Il reste là, plaqué contre le mur, sans bouger, l’air d’un homme frappé par la foudre.
Lord Carnarvon finit par s’impatienter :
– Dites quelque chose, parlez, je vous en supplie.
Que voyez-vous ?
Carter se retourne. Il est pâle. Sa voix est rauque :
– Des choses fantastiques !
Au matin du 25, on releva soigneusement les empreintes de sceaux, on les photographia, puis on enleva les grosses pierres qui bloquaient le passage.
C’est ainsi que fut mise à jour l’entrée d’un corridor en pente (mais non en escalier) dont la largeur était celle de la porte, et la hauteur de deux mètres environ.
Comme je l’avais déjà vu à travers le trou fait dans la porte, ce corridor était entièrement comblé par des pierres et des moellons, qui provenaient sans doute de ses propres déblais. L’examen de ces décombres, comme celui de la porte, révélait que la tombe avait été plusieurs fois violée.
En déblayant le corridor, nous avons découvert dans les couches inférieures des moellons , des poteries brisées, des jarres, certaines en albâtre, intactes ou en morceaux, des vases peints, de nombreux fragments, de petits objets et des outres qui avaient dû servir à transporter l’eau pour faire le plâtre. Toutes ces choses étaient des preuves des pillages et nous les considérions comme telles.
Le jour suivant, le 26 novembre, fut le Grand Jour, le plus beau de ma vie, et je n’ose pas espérer vivre encore un jour semblable.
Au milieu de l’après-midi, à dix mètres environ de la deuxième porte, nous en découvrîmes une autre, scellée, réplique exacte de la première.
L’empreinte du sceau était moins nette, mais c’était bien celui de Toutankhamon et de la nécropole royale. Ici aussi on voyait très bien que la tombe avait été violée. Nous ne doutions plus d’être sur le point d’ouvrir une cachette et non une tombe. Nous n’allions pas tarder à être fixés. La porte scellée était devant nous, et derrière la porte scellée, la réponse à nos questions.
Lentement — comme cela nous sembla long ! — les derniers gravats qui encombraient le bas de la porte furent déblayés. L’heure décisive était arrivée.
Les mains tremblantes, je pratiquai une petite brèche dans la porte en haut et à gauche. J’y introduisis une tige d’acier qui ne rencontra que le vide et nous allumâmes des bougies pour savoir si l’air était toxique. Puis élargissant la brèche, j’éclairai l’autre côté de la porte afin de savoir ce qui s’y trouverait. Lord Carnarvon, lady Evelyn et Callender se tenaient derrière moi, fiévreux, attendant le verdict.
D’abord je ne distinguai rien, car le courant d’air chaud faisait vaciller la bougie, puis mes yeux s’accoutumèrent à la lumière et lentement les objets qui étaient dans la chambre sortirent de l’ombre ; il y avait des animaux étranges, des statues et de l’or, partout de l’or resplendissant.
Pendant un moment, qui parut à mes compagnons une éternité, je demeurai muet, paralysé par l’émerveillement ; quand lord Carnarvon, incapable d’attendre plus longtemps, me demanda anxieusement :
— Voyez-vous quelque chose ?
Je ne pus que balbutier :
— Oui, c’est merveilleux.
Alors, élargissant encore l’ouverture afin de voir ensemble, nous y glissâmes une torche électrique.
La plupart des archéologues, je crois, reconnaissent avoir ressenti une sorte d’effroi, et presque de la gêne en forçant l’entrée d’une chambre que des mains pieuses ont refermée et scellée il y a tant de siècles. Mais à cette dimension, la notion du temps n’existait plus.
Ce sol sur lequel nous étions n’avait pas été foulé depuis trois mille, peut-être quatre mille ans, et cependant autour de nous foisonnaient les signes d’une vie toute proche ; il y avait une coupe à moitié remplie de mortier pour la porte, une lampe noircie de fumée, des marques de doigts sur les surfaces fraîchement peintes, une guirlande d’adieu au-dessus du seuil.
Tout cela semblait ne dater que de la veille. Et l’air même que nous respirions et qui n’avait pas été renouvelé depuis des siècles, nous le partagions encore avec ceux qui avaient conduit la momie à son lieu de repos. Le temps est annihilé par tous ces détails familiers et l’on a conscience d’être un intrus.
C’était le premier rayon de lumière qui perçait l’obscurité de la chambre depuis trois mille ans. Il nous était impossible d’évaluer le trésor qui se trouvait devant nous. L’effet était stupéfiant, écrasant.