La révolution culturelle sous Mao. Un vent de folie

En 1966, le leader de la Chine populaire, Mao Zedong, sentant sa position compromise par des luttes au sommet de l’État, suscite une immense chasse aux sorcières contre les « révisionnistes ». Jusqu’en 1969, la jeunesse, enrôlée dans les « gardes rouges », persécute au nom du culte de Mao tous les cadres du pays : responsables politiques, intellectuels, artistes, créateurs.

Pendant la révolution culturelle
Pour être accusé d’être contre-révolutionnaire, il suffisait souvent d’avoir chez soi des livres classiques ou des traductions, un piano, des couverts occidentaux ou tout autre
objet représentant l’impérialisme occidental

La Révolution culturelle en Chine en 1966

La révolution culturelle sous Mao. Un vent de folie

Tout commence le 1er juin 1966. Ce jour-là, les étudiants se mobilisent à la suite de la lecture d’un «dazibao» (une affiche murale) placardé à l’université de Beida, à Pékin, par une enseignante en philosophie. L’un des passages du texte engage les jeunes gens à « briser tous les contrôles et les maléfiques complots des révisionnistes, résolument, radicalement, totalement, complètement ».
Dans les semaines qui suivent, les lieux d’enseignement sont désertés et la jeunesse s’organise en gardes rouges. Dès le 26 juillet, le Parti communiste ferme les écoles et les facultés pour une durée indéterminée. Cinquante millions d’adolescents, qui n’ont parfois pas plus de 14 ou 15 ans, se mettent en marche contre tous les pouvoirs afin de concrétiser le slogan de Mao Zedong : « On a raison de se révolter. »
Au nom du « Petit Livre rouge », le recueil des pensées de Mao, les gardes rouges humilient, battent et torturent les enseignants, les écrivains, les cadres politiques des provinces et certains adversaires de la ligne du Parti communiste. Ils forcent leurs victimes à faire d’interminables et épuisantes séances d’autocritique. Ils maltraitent tellement ces hommes et femmes qu’un certain nombre d’entre eux préfèrent le suicide à ces supplices : ainsi le célèbre écrivain Lao She. Non contents de s’en prendre aux gens, ils abattent aussi tous les symboles de la culture, mettant à sac et incendiant systématiquement bibliothèques et musées.
Ce vent de folie provoque dans les villes une psychose mais peu de résistance, car les gardes rouges ont l’appui du « Grand Timonier » — comme Mao se fait appeler et de son épouse Jiang Qing. À la fin de l’année 1966, la jeunesse a bien réussi à renverser l’ordre établi.

Gardes rouges contre gardes rouges

Gardes rouges contre gardes rouges

L’année suivante, cependant, des clans adverses se forment et les jeunes qui ont pris le pouvoir dans certaines grandes villes se divisent entre eux. À Canton, durant l’été, l’affrontement entre deux factions provoque 900 morts. Le pouvoir central commence à être effrayé par le radicalisme du mouvement qu’il a lui-même suscité et profite de ses dissensions internes pour lui opposer l’armée. À Wuhan, dans le centre de la Chine, les troupes, en juillet, délogent de force ces nouveaux dirigeants; à Pékin, elles sont obligées de défendre le ministère des Affaires étrangères, que les gardes rouges tentent de prendre d’assaut.
L’anarchie règne dans toute la Chine et le pouvoir prend conscience qu’il ne maîtrise plus le phénomène. C’est alors une véritable guerre civile qui s’instaure entre la jeunesse fanatisée par les mots d’ordre révolutionnaires, et les dirigeants de Pékin, incapables d’endiguer le processus.

Une brutale reprise en main

En 1968, dans les universités réouvertes, des équipes de propagation de la pensée de Mao Zedong ramènent à la soumission politique les adolescents qui sont allés trop loin dans la remise en cause de l’ordre établi.
Pendant l’hiver, les gardes rouges sont dissous et 20 millions de jeunes gens arrêtés et envoyés dans les campagnes, dans des camps de rééducation politique ou des institutions punitives. La reprise de certaines villes ou régions par l’armée se transforme en véritable boucherie. Dans le sud de la Chine, les combats sont extrêmement violents : à Wuzhou, dans le Guangxi, des bombardements au napalm détruisent la ville et font des milliers de victimes; il faut 30 000 hommes pour reconquérir Guilin; fin août, tout le Sichuan connaît des combats sanguinaires contre les gardes rouges, qui sont massacrés.
L’anéantissement des fers de lance de la Révolution culturelle produit une jeunesse désespérée pour longtemps et meurtrit une société déstructurée par ce vent de radicalisme et de violences.

questions-reponses
Témoignage...
Un témoignage d'une ancienne garde rouge

Li Xiao, une garde rouge qui avait dix-huit ans au moment des événements, raconte :
Plus tard, comme tout le monde, j'ai participé à des pillages. Dans les maisons mises à sac, j'ignore encore pour certaines d'entre elles à qui elles appartenaient. Il suffisait d'un cri de ralliement et on « réquisitionnait » une camionnette, on se hissait tous dedans et on partait casser, ignorant le plus souvent ce qu'on pillait et pourquoi, et le nom de nos compères et d'où ils venaient [...]
Parfois on coinçait des loubards [...], on les chopait, on les battait jusqu'à ce qu'ils nous .supplient "Pitié, pitié pour nous madame la garde rouge".
« (...]J'ai coupé des nattes, je participais sans cesse à des débats, des meetings de lutte, et puis, à la campagne, nous sommes allées "échanger des expériences avec les paysans". J'ai quitté ma famille pour la première fois, sans une larme [..]. »

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