Napoléon III urinait du sang presque pur

A partir de l’année 1865, le neveu de Napoléon 1er supporte de moins en moins le calcul à la vessie qui lui fait vivre le martyre. Mais ses médecins préfèrent voir souffrir Napoléon III plutôt que de le faire mourir sous leur bistouri. Et c’est un véritable somnambule qui part à la guerre en 1870.

Napoléon III avait un calcul dans la vessie

En 1865, des douleurs dans le bas-ventre et une gêne urinaire devenue courante chez lui s’associent pour la première fois à de la fièvre. Napoléon III est au camp de Châlons, c’est donc à Larrey, inspecteur du service de santé des armées, que revient le soin de l’examiner et de diagnostiquer là, un calcul dans la vessie. Une lithotritie est proposée à l’empereur qui ne dit ni oui ni non, mais bientôt une amélioration s’étant produite et la fièvre ayant disparu, il n’en est momentanément plus question.
Dans les deux années qui suivent, la situation va évoluer ainsi : quand Napoléon III souffre, il admet l’opération ; dès qu’il va mieux, il la rejette ou en repousse indéfiniment la date. Conneau, son Premier médecin, trouve beaucoup plus distrayant d’attribuer les fonds secrets dont le souverain lui a confié la gestion que de jouer son rôle en tentant de convaincre celui-ci de se faire opérer. Nélaton, à qui reviendrait ce rôle et qui a de solides raisons de craindre de demeurer pour la postérité le chirurgien qui a tué l’empereur, partage le même attentisme.
De son côté, l’opinion publique observe, jugeant Napoléon III vieilli, le visage parfois défait, l’allure lourde. Certains ministres le trouvent même souvent absent, évoquant à mi-voix son engourdissement lors des Conseils. Mais l’empereur ne stoppe pas ses activités et, à en croire les rumeurs, le nombre de ses aventures galantes ne diminuerait pas.
La fin de l’été 1869 est pesante. Les accès fébriles se multiplient alors que les douleurs sont deveniks constantes.Le 12 septembre, le départ d’Eugénie pour Suez, où elle doit aller inaugurer le canal est annulé. Mais, une nouvelle fois, les choses paraissent s’améliorer. L’impératrice part, mais lors des adieux, plusieurs témoins observent que Napoléon III semble fardé.
Le 1er juillet 1870, tout s’assombrit de nouveau. Au docteur Sée qui trouve que le calcul a notablement grossi, le malade confie : Je souffre tellement qu’il ne m’est pas possible de monter à cheval. Sée exige alors une consultation générale à laquelle Conneau et Nélaton ne peuvent se soustraire et où il expose que seule une lithotritie urgente peut sauver l’Empereur. Nélaton demeure silencieux. S’il occupait en qualité de malade ordinaire un lit de votre salle d’hôpital, que feriez-vous demain à la visite ? , lui lance Sée exaspéré. Je le sonderai, répond calmement le chirurgien qui ajoute : Mon cher confrère, vous êtes bien jeune. Vous ne savez pas ce que c’est de soigner un souverain ; ce n’est pas un malade comme un autre. Il faut savoir attendre et dissimuler quelquefois son diagnostic.

Napoléon III urinait du sang presque pur

Napoléon III, malade, avait un calcul dans la vessie et urinait du sang presque pur

Nélaton aura gain de cause et rien ne sera décidé. Sans doute, la mort sous son bistouri de Troplong, président du Sénat, et du maréchal Niel, l’un et l’autre présentant le même mal que Napoléon III, ne l’incite pas à se précipiter. Mais l’avenir justifiera le point de vue médical qu’il développe : tant qu’on laissera le calcul en place, le malade souffrira, énormément même par périodes, mais il vivra ; dès qu’on se mêlera d’enlever le calcul, la mort ne sera pas bien loin. Mais, pour l’image du souverain, il en eût peut-être été mieux ainsi, car, dès le début de la guerre de 1870, immobile, muet, ne répondant à personne, comme le décrit Maxime du Camp, il est devenu, sous l’effet des calmants, un véritable somnambule qu’on hisse sur son cheval, sa culotte bourrée de serviettes. Un médecin dira qu’il urinait du sang presque pur.
Apprenant le départ de Napoléon III pour Metz, Sée s’était écrié : C’est abominable de mettre un homme dans un pareil état à la tête d’une armée. C’est la surprise du médecin qui surprend. Il était bien placé pour savoir que l’abomination était de ne pas avoir déchargé l’empereur de ses responsabilités, sinon en 1869, du moins dans les jours qui suivirent la consultation de juillet 1870.

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