La découverte du charnier de Katyn en 1943

En avril 1943, des soldats allemands ont découvert un charnier où étaient enterrés les corps de 4 500 officiers polonais, autrefois prisonniers des Russes. 

La colline des chèvres à Katyn

La découverte du charnier de Katyn en 1943

La « Colline des chèvres » (Kozogory) s’élève dans la forêt de Katyn, que traverse le Dniepr. Depuis longtemps elle était connue dans les environs comme un lieu d’exécution pour ceux qui s’opposaient au régime. Dès 1929, la police secrète d’Etat soviétique avait construit une datcha (villa) près de la rive du Dniepr, installé une clôture de barbelés autour de la zone et planté une palissade en bois le long de la route de Vitebsk.
Ayant une idée très nette de ce qui se passait dans la forêt interdite, les paysans des environs avaient coutume de dire : « Boucle-la ou on t’emmènera à la Colline des chèvres. » Quelquefois, de jeunes imprudents se faufilaient en rampant sous les barbelés pour ramasser les champignons qui poussaient là en abondance, mais ils y renoncèrent rapidement lorsqu’ils constatèrent que des hommes armés et des chiens venus de la datcha patrouillaient constamment dans le bois.

La découverte du charnier de Katyn

En avril 1943, des soldats allemands ont découvert le charnier de Katyn où étaient enterrés les corps de 4 500 officiers polonais, autrefois prisonniers des Russes. 

La découverte du charnier se produisit de la façon suivante. Les Allemands avançaient le long de la rive gauche du Dniepr ; Smolensk tomba le 15 juillet 1941. Les Soviétiques avaient abandonné Katyn, et pour la première fois depuis de longues années l’accès de la forêt était libre ; durant plusieurs jours le désordre fut total et si quelqu’un avait été vivant dans le bois, il lui eût été facile de reprendre sa liberté. Plus tard, un officier allemand s’installa dans la datcha et un détachement de la police allemande de sécurité en campagne, placé sous le commandement du lieutenant Voss, arriva à Smolensk.
Au printemps de 1942 se présentèrent de nombreux Polonais appartenant à l’Organisation Todt (c’est-à-dire le service qui, chez les Allemands, dirigeait le travail forcé). Ils avaient pour tâche de ramasser du riblon (débris de ferraille) et « campaient » dans des wagons de chemin de fer abandonnés, près de Smolensk. Pendant leurs longs parcours aller et retour sur la ligne, à la recherche des débris, les Polonais eurent sans doute vent de certaines rumeurs. Cela explique probablement leur incursion dans les bois de Katyn, à l’automne, et leur examen serré des lieux sur la « Colline des chèvres ». Ils exhumèrent au moins un officier vêtu d’un uniforme qui était sans conteste celui de leur pays, puis l’ensevelirent de nouveau avec les honneurs, en élevant une croix de bouleau sur sa tombe, et une autre au-dessus d’un monticule voisin qui présentait un aspect suspect, et dont les bords commençaient de s’effriter. Puis l’hiver arriva dans toute sa rigueur, le sol gela, durcit et toute nouvelle fouille devint impossible.
Au début du printemps de 1943, Ivan Krivozertzev, paysan (soviétique) de l’endroit, remarqua par hasard dans un journal de propagande écrit en russe (le Novyj Put) que le général Sikorski avait organisé une armée polonaise en U.R.S.S. et que ce général, en dépit de recherches incessantes, n’arrivait pas à retrouver la trace de plusieurs milliers de ses officiers que l’on savait avoir été prisonniers des Soviétiques en 1939 et dont on était absolument sans nouvelles depuis avril 1940. Ivan était un homme pieux, dont la conscience se troubla au souvenir de ce qu’il avait vu pendant tout le mois en question.
A cette époque, des wagons de chemin de fer plombés étaient arrivés jour après jour à Smolensk et on les avait aiguillés sur des voies de garage masquées par des palissades à la gare de Gniezdovo. Les passagers étaient chargés dans des « corbeaux noirs » (voitures cellulaires) et emmenés vers Vitebsk, sous la garde de la police secrète d’État soviétique. Les convois s’arrêtaient tous une fois la forêt de Katyn atteinte.
Ivan se rappela aussi qu’en mars il avait vu des prisonniers ordinaires de Smolensk conduits vers la « Colline des chèvres », dans des camions ouverts et portant des pelles et des pioches « pour creuser de grandes et profondes tranchées ». Il ne pouvait manquer de relier ces deux événements à l’article du journal. Il se rendit donc chez l’interprète du lieutenant Voss, au bureau de la police allemande de sécurité en campagne, à Gniezdovo et dit timidement : « Sikorski cherche ses officiers en Sibérie, mais ils reposent ici, massacrés, sur la « Colline des chèvres… »
Le secret était enfin découvert. Fin février, les Allemands, placés sous le commandement du lieutenant Voss, arrivèrent sur la « Colline des chèvres ». Ils portaient, eux aussi, des pelles et des pioches. Un paysan du nom de Kisselev, qui habitait dans la forêt, leur montra où ils devaient commencer à creuser. Ils constatèrent tout de suite que le sol des monticules n’était pas de la même nature que celui du reste du terrain et que la taille des jeunes sapins plantés sur les tombes donnait avec certitude aux botanistes la date exacte de leur transplantation à cet endroit, c’est-à-dire avril 1940.

Tous avaient reçu une balle dans la nuque

Tous avaient reçu une balle dans la nuque et, dans la plupart des cas, avaient eu les mains attachées derrière le dos.

On commença de creuser, et pendant les quelques jours qui suivirent on déterra plusieurs dizaines de corps. Tous avaient reçu une balle dans la nuque et, dans la plupart des cas, avaient eu les mains attachées derrière le dos. La façon dont les cordes étaient nouées et liées était aussi révélatrice que les sapins. Au cours de leur recherche, les Allemands découvrirent également les cadavres de civils soviétiques des deux sexes exécutés bien avant 1940. Ces malheureux avaient les mains liées avec les mêmes cordes et de la même manière. En outre, les papiers trouvés sur les corps étaient extrêmement révélateurs et prouvaient sans l’ombre d’un doute qu’il s’agissait bien des officiers disparus de Kozelsk. Le spectacle était macabre à l’extrême. La présence d’un cadavre du sexe féminin au milieu de tous ces hommes assassinés apporta une nouvelle touche d’horreur. On identifia la pauvre femme : il s’agissait de Janina Lewandowska, autrefois prisonnière à Kozelsk.
Oubliant, pour les besoins de la cause, Auschwitz, Buchenwald, Dachau et autres camps du III » Reich, les Allemands donnèrent la plus large publicité à leur découverte, en insistant lourdement sur l’indignation qu’elle soulevait chez eux. Finalement, ils déclarèrent avoir trouvé 12 000 cadavres, à Katyn. Ce chiffre, qui reposait sur le nombre total connu des officiers polonais, est inexact. En réalité on avait exhumé 4 500 corps, tous de prisonniers venant de Kozelsk. En dehors de quelques centaines dont on savait qu’ils avaient survécu, il n’existait aucune trace des officiers naguère détenus à Starobelsk ou à Ostachkov.

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