Le 18 mars 1933 Joseph Goebbels, ministre de la Propagande du Reich, ébauche le nouveau statut de la femme allemande :
Sa première, sa meilleure place, celle qui lui convient est dans la famille. La plus merveilleuse des tâches qu’elle puisse accomplir est de donner des enfants à son peuple.
Les femmes dans le système nazi
1918 – 1919 – La république de Weimar accorde le droit de vote aux Allemandes. Celles-ci votent pour la première fois en janvier 1919.
1931 – Création de la NS-Frauenschaft (NSF), l’organisation politique des femmes nationales-socialistes qui vise à promouvoir l’idéal de la femme modèle du Ille Reich. 2 millions d’adhérentes en 1935.
1932 – A l’élection présidentielle, 51,6 o/o des électrices ont voté pour Hindenburg ; 26,5 o/o pour Hitler.
1933 – 30 janvier : le président Hindenburg appelle Hitler à la chancellerie.
En avril, pour lutter contre le chômage masculin, 900 000 femmes, la plupart de la fonction publique, , sont renvoyees.
Numerus clausus de 10 % dans l’enseignement secondaire et supérieur visant les filles et les juifs. Un tribunal de santé héréditaire , composé d’un juge, d’un médecin et d’un SS, peut obliger une femme à avorter si elle ou son conjoint présente des risques de pathologie héréditaire.
1934 – Au congrès de Nuremberg, Hitler exalte la femme qui, dans son foyer, mène la bataille de la fertilité et de la natalité.
Les années 1920 avaient apporté aux Allemandes une certaine promotion: elles avaient acquis le droit de vote en 1919, puis l’industrialisation et le boom des services avaient changé la donne. Plus d’un tiers des femmes prirent un emploi, dont 30 % comme ouvrières. Sur les 3,5 millions d’employés, un tiers était des femmes, surtout sténodactylos et vendeuses, jeunes et souvent célibataires. La mode créa la « garçonne » dont les vêtements plus légers, la coiffure plus courte libéraient les mouvements. Son travail, quoique moins bien rémunéré que celui des hommes, et le divorce plus facile lui conférèrent un surcroît d’indépendance.
Les femmes fumaient, faisaient du sport, les plus riches conduisaient leur voiture et certaines pilotaient un avion. Le nouveau cinéma allemand lança des créatures mythiques, comme la Danoise Asta Nielsen, qui joua Hamlet à Berlin en habit d’homme, Greta Garbo, Anita Berber et Marlene Dietrich, femme fatale dans L’Ange bleu, de Josef von Sternberg en 1930. Mais la grande crise de 1929-1930 brisa cet élan des Années folles.
Le parti nazi prend alors le contrepied de l’émancipation féminine, qui mène, pour Hitler, à « la mort du peuple». À ses deux premiers slogans, le nationalisme et le socialisme, il ajoute l’antisémitisme et… l’antiféminisme. Le premier congrès du NSDAP vote, à l’unanimité, une motion stipulant que «jamais une femme ne serait admise à la direction du parti ni dans son comité directeur ». L’objectif est simple : «Le programme de notre mouvement féminin national-socialiste n’a qu’un article et cet article a pour nom : l’enfant. » Ce qui n’empêchera pas Hitler d’exercer une fascination sur les femmes. Il ne se mariera d’ailleurs pas pour qu’elles s’identifient à lui; il sera leur guide (Führer) et leur séducteur (Ver-führer).
En 1932, après un recul électoral, il infléchit momentanément son programme en faveur de leur droit au travail. Goebbels le note dans son Journal, le 20 mars 1932: la femme sera la camarade sexuelle et professionnelle de l’homme, jadis aux champs, maintenant au bureau. Que Hitler soit arrivé au pouvoir grâce au vote des femmes est chose souvent admise. Mais ensuite, lois et décrets «les ramenèrent au foyer où était leur place », avec pour mission de «donner un enfant au Führer », une femme sans enfant étant une « déserteuse».
De l’émancipation des années passées, les nazis gardèrent le sport, la vie au grand air, les vêtements commodes, mais uniformes. Une sorte de Décalogue créa l’inverse de la garçonne : « Une femme allemande ne fume pas ». « Une femme allemande ne se maquille pas ». Point de bijoux, hormis une alliance. Placée sous l’autorité de son homme, lui-même dévoué au Führer, la femme « propre » et « saine » fait fructifier « l’héritage génétique ». La future épouse est préparée par la Fédération des jeunes filles allemandes (BDM), et par le Service du travail. Et pour personnaliser leur lien avec Hitler, les jeunes mariés reçoivent un exemplaire de Mein Kampf