Quand la Révolution dévore ses enfants

L’exécution des Girondins fut l’un des épisodes les plus tragiques de la Révolution. L’absence de décisions dans les moments les plus cruciaux, les orientations aventureuses telles que la déclaration de guerre contre les puissances étrangères et une trop grande modération dans l’application des lois contribueront à la perte de ces hommes qui furent les enfants de la République Ils furent d’authentiques républicains.

Une liste infernale et destructrice

Ces députés, arrêtés le 2 juin 1793 précédent, n’avaient pas réussi ou n’avaient pas voulu fuir. Certains s’étaient réfugiés dans leur département ou se cachaient à l’instar de Roland, de Condorcet ou de Barbaroux, pour échapper à un procès dont le verdict était rédigé à l’avance. Tous avaient le sentiment à ce jour que l’on voulait les amalgamer dans une liste infernale et destructrice, composée d’aristocrates, de voleurs et d’escrocs, . pour mieux les faire taire et salir leur mémoire avant qu’ils fussent tués. Quinze jours auparavant, Marie-Antoinette, la veuve Capet, ancienne reine de France, avait quitté ces murs pour gagner en charrette la place de la Révolution
où la guillotine, nouvel instrument du bourreau Charles Henry Sanson, l’attendait. La veille encore, on avait jugé le députe Perrin. anciennement maire de Troyes, richissime négociant de toiles qui s’était enrichi sur l’Etat en fournissant pour plus de cinq millions de toiles de coton. II avait été condamné à douze ans de fers et à être exposé sur la plateforme de la guillotine durant six heures_ En mêlant à ces députés la reine, l’ancien maire de Paris, Bailly, madame Roland et la « du Barry », les Comités ne souhaitaient-ils pas voir les uns s’entremêler aux autres et se confondre dans l’esprit de ceux qui auraient pu réagir au procès des pères de la République ?

Le procès et la chute des Girondins

Le procès des Girondins arrêtés fut assez long à s'organiser.

Le procès des Girondins arrêtés fut assez long à s’organiser. Leurs adversaires commençaient à s’agiter et Hébert mena dans le Père Duchesne une campagne acharnée, surtout contre Brissot qui préparait un long mémoire pour sa défense. Les clubs harcelèrent Fouquier-Tinville pour que l’affaire vienne au tribunal. Le procès des Girondins et d’autres députés victimes de dénonciations et prévenus de conspiration fut ensuite rapidement mené, entre le 4 et le 30 octobre 1793.
Il se déroula dans une quasi-indifférence. Le mois d’octobre était dur pour les Parisiens, surtout préoccupés par les difficultés alimentaires : pénurie de pain et d’autres denrées.
L’acte d’accusation d’André Amar fut impitoyable et les charges, retenues contre les Girondins après l’audition de témoins spécialement choisis, lourdes. La principale était d’avoir voulu porter l’insurrection en province en y plaçant la souveraineté nationale.
Après le réquisitoire de Fouquier-Tinville, les 21 accusés furent condamnés à mort le 30 octobre pour « conspiration contre l’unité, l’indivisibilité de la République, contre le bien et la sûreté du peuple français ». Malgré leurs cris de protestation les condamnés furent reconduits en prison.
Certains prétendent qu’un dernier repas avait été offert aux condamnés et qu’ils passèrent la nuit dans une salle de la Conciergerie à parler de liberté, de république, de religion, et ce, devant le cadavre livide de Valazé, dont le corps déjà raidi avait été installé sur trois tabourets et recouvert d’un drap sanglant

43 minutes suffirent à l'exécution des Girondins

43 minutes suffirent à l'exécution des Girondins

Le lendemain matin, vers neuf heures et demie, après avoir reçu les derniers ordres du Palais, Sanson et ses aides se présentèrent dans la grande salle des Morts où tous étaient rassemblés. Nappier, l’huissier de circonstance, fit l’appel face à l’indifférence de tous, sauf de Vergniaud qui se lança dans un discours ardent. C’est alors que l’on commença la toilette. On coupa leurs cheveux et on attacha leurs mains, puis on le mena dans la cour de Mai où cinq charrettes les attendaient, la cinquième étant réservée à Valazé.. Le temps s’était radouci, et un petit vent pluvieux du sud-ouest s’installait sur Paris. La grande grille s’ouvrit et la troupe se dirigea vers la place de la Révolution dans un silence morbide.
Tous se serraient les uns contre les autres, dans une dernière étreinte fraternelle, Seul l’évêque Fauchet, député du Calvados, parut abattu en apercevant le couperet hissé en haut de la guillotine. On fit descendre les vingt et un députés près de l’estrade sanglante et on les parqua entre une double haie de gendarmes. Alors les Girondins, unanimes, dans un élan de courage, reprirent en chœur le chant de La Marseillaise, couvrant presque la voix de l’huissier qui les désignait pour mourir. Sillery fut appelé le premier, puis ce fut au tour de Carra, de Duperret, de Lacase de disparaître en haut de La plateforme. Les survivants chantaient toujours Les tètes de Gensonné, Brissot. Duprat, rejoignirent bientôt celles de leurs collègues décapités. Certes, les chants devenaient plus discrets, mais les condamnés encore vivants chantaient toujours. Lorsque, après que Vergniaud eut la tête tranchée, on fit monter le dernier sur l’estrade, le député angevin Louis- François Vigée, celui-ci poursuivit son chant, en mémoire des autres. jusqu’au moment où le couperet siffla et interrompit cet hymne fraternel qui les avait accompagnés jusque dans la mort..
Il n’avait fallu que 43 minutes pour endeuiller la République et lui ôter ses enfants tes plus chers.

Après les Girondins, les Hébertistes et les Dantonistes...

Après les Girondins furent éliminés les Hébertistes et les Dantonistes

La guillotine fonctionna à Lyon et à Bordeaux. A Nantes, les noyades de Carrier mirent le comble à l’horreur. Rennes et Angers ne devaient pas non plus être épargnés par la Terreur. Ce coup de force du 2 juin 1793, qui avait éclaté à Paris, s’était répercuté dans le reste de la France. La réaction fut vive dans certaines régions. L’événement le plus marquant, qui en fut une des conséquences, fut l’assassinat de Marat, le 13 juillet, par Charlotte Corday, qui avait rencontré à Caen Buzot, Salles, Pétion, Barbaroux et Louvet de Couvray après leur fuite.
Les Girondins avaient payé cher leur prédominance politique d’autrefois et leurs attaques contre les désordres et les mesures d’exception. Ils avaient essayé de faire passer leurs idées dans les journaux, à la tribune de l’Assemblée, dans les clubs ; mais ils avaient échoué. La vengeance fut terrible.
Après les Girondins furent éliminés les hébertistes et les dantonistes et Robespierre exerça, surtout à partir d’avril 1794, la dictature morale à laquelle il aspirait.

Le saviez-vous ?

C’est dans une cohue et un vacarme terrible que la sentence fut rendue, ils furent tous condamnés à mort.

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