Le vin, la gnôle et le tabac du Poilu dans les tranchées

Ce sacré pinard. Ecrit un chasseur du 30e BCA, c’est encore lui qui nous fait oublier notre cafard, c’est notre meilleur copain, c’est pas une chose avouable, mais c’est comme ça. Gare à ceux qui ne pourront pas s’en déshabituer après la guerre.

Le Saint Pinard
Pendant la Grande Guerre, le vin est très prisé par les soldats qui lui vouent un culte. Synonyme de solidarité et de courage, il est également vecteur de dérives et de désordres poussant les autorités à réagir

Le vin et la fameuse gnôle du Poilu pendant la Première Guerre Mondiale

L’alcool, la fameuse « gnôle », qui tenait le milieu entre l’alcool à brûller et l’élixir parégorique, n’a pas eu seulement le rôle d’excitant distribué les veilles d’attaque, que certains écrivains pacifistes, souvent ignorants de la réalité du front, ont exagéré à plaisir. Elle a été souvent le coup de fouet qui ragaillardissait de pauvres hommes épuisés de fatigue : regain de chaleur animale dans une nature où le froid gelait parfois la soupe et jusqu’au vin.
A peine un demi-quart de gnôle pour l’escouade. Il fallait répartir la gnôle entre les neuf occupants. Le caporal s’en acquitta avec cette précision qui ravissait tous ses poilus. Quand ce fut fini, tout fut à recommencer. « Du rab, y a du rabiot », constata le cabot, non sans un sourire candide et malicieux. Ainsi, grâce à son adresse, le brave homme donnait à tous l’illusion de l’abondance .

Le vin et l'eau dans les tranchées

Si le bienfait du vin fut révélé à beaucoup de ceux qui ne le connaissaient guère et fit quasiment l’unanimité, l’envers fut le développement de l’ivrognerie au repos et surtout à la veille des relèves.
Combien en ai-je connu, de ces pauvres bougres, sobres avant 1914, et qui, à force d’avoir soif et faim sous la mitraille, ont perdu le nord, en essayant de puiser l’oubli au fond du bidon de pinard ou du quart de gnôle. Ainsi la Grande Guerre aura achevé l’œuvre du troquet et contribué à l’excessif développement de la vigne après la guerre. Si pourtant les soldats eurent, en ligne, à souffrir de la soif, ce fut avant tout la soif d’eau. Seuls les secteurs organisés disposaient d’une eau javellisée qu’on déclarait potable. Dans les secteurs boisés ou les ravins, on trouvait parfois une source qui apportait une fraîcheur si appréciée que souvent les corvées d’eau adverses s’y succédaient, grâce à une sorte d’entente tacite entre les deux camps. Mais la recherche de l’eau pouvait aller jusqu’au risque de la vie.

Perlots et gauloises bleues, le tabac de base du poilu

Avec le liquide et la soupe, parvenait le perlot, ces gros cubes de tabac de troupe, enveloppés d’un grossier papier gris, et distribués assez parcimonieusement sous le nom de « gros Q ». Ils suffisaient à peine aux nombreux fumeurs de pipe ; quant aux fumeurs de cigarettes, généralement plus jeunes, ils ne pouvaient se faire ravitailler en gauloises bleues (qui existaient déjà) que par l’arrière. Les fumeurs formaient une sorte de communauté. C’est une religion qui a ses rites dont le plus touchant est la communion du feu. La cigarette à bout d’or fraternise avec le mégot. L’officier et le soldat se rapprochent dans ce geste spontané

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