L’Angleterre, pendant la grande bataille de l’air de l’été et de l’automne 1940, dut pour une grande part sa survie à ses deux remarquables avions de chasse: le Spitfire et le Hurricane.
La Royal Air Force avait trois types de chasseurs; le robuste Hurricane, le plus ancien, le Spitfire et le Boulton-Paul Defiant. Le Hurricane représentait l’appareil de base de la R.A.F. depuis le début de la guerre. A la fois solide et sûr, c’était, en fait, une véritable plate-forme d’artillerie volante. Dès le départ, on équipa ce modèle de huit mitrailleuses; par la suite, on en ajouta quatre autres et, en 1940, on dota quelques unités de canons de 20 mm. Malgré cela, cet appareil avait deux défauts assez sérieux. Il était légèrement moins rapide que le Messerschmitt-109, et son plafond pratique était de 300 mètres inférieur aux 11 000 mètres de celui du Messerschmitt-109. Le Hurricane présentait également un angle mort qui permettait à un adversaire de l’attaquer par au-dessus.
Le Hurricane fut progressivement remplacé par le Spitfire, nettement supérieur. Un peu plus rapide que le Me-109, le Spitfire était plus maniable. Il pouvait virer plus sec que son adversaire, avantage vital en combat aérien qui lui permettait d’attaquer le Me-109 par l’arrière.
Dérivé d’un hydravion de course, le premier chasseur Spitfire sortit des chaînes de montage de la Division Supermarine de Vickers-Armstrong en 1938, avant le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Sa ligne aérodynamique lui permettait de supporter le poids d’un pilote, d’un moteur Rolls-Royce et de huit mitrailleuses, tout en restant très maniable, puisqu’il pouvait évoluer dans un rayon plus serré que tout autre chasseur. Un expert en aéronautique décrivit le Spitfire, en raison de sa vitesse, comme le meilleur chasseur défensif conventionnel de la guerre.
Malgré cela, le Spitfire, comme le Hurricane, avait une sérieuse faiblesse. Il ne possédait pas de pompe à injection, de sorte qu’en piqué le moteur calait, ce qui se révélait souvent fatal pour l’avion et le pilote.
Si la R.A.F. n’avait pas de système à injection, c’était le résultat d’un des «ratés» les plus stupéfiants de cette guerre. Un jour, au début de 1940, un ingénieur anglais de l’aéronautique qui avait fait de l’espionnage pour son pays se trouvait dans un café de Belgrade, lorsqu’un étranger lui tendit, sans plus d’explication, un paquet enveloppé dans du papier journal. En l’ouvrant, il découvrit et reconnut immédiatement une pompe à injection de Me-109. L’ingénieur fit parvenir la pompe aux services de l’ambassade de Grande-Bretagne à Belgrade. Mais ceux-ci ne surent pas en comprendre la signification profonde. Ils l’envoyèrent par courrier via l’Italie au ministère de l’Air à Londres. Le paquet n’atteignit jamais sa destination.
Le troisième chasseur de la R.A.F., le Defiant, était un biplace, de la même taille que le Hurricane mais sans l’angle mort que celui-ci possédait derrière le cockpit. En outre, il était équipé à l’arrière d’une tourelle armée de quatre mitrailleuses, avec un large champ de tir. Au début, les pilotes allemands confondant cet avion avec le Hurricane tentaient de l’atteindre par l’arrière, ce qui leur valait une leçon mortelle. Mais, dès qu’ils eurent appris à reconnaître le Defiant, celui-ci se révéla très vulnérable. Sa faible vitesse en palier et ascensionnelle, son peu de maniabilité le rendaient aussi inefficace en opération diurne que l’était le Me-110.
La Grande-Bretagne possédait également des bombardiers; ceux-ci furent envoyés pour attaquer des objectifs au coeur industriel de l’Allemagne, la Ruhr, et dans les ports de la Manche où un nombre sans cesse croissant de chalands se rassemblaient pour l’opération Lion de mer. Mais, à ce stade de la guerre, les raids de bombardement britanniques, bien qu’ayant réussi à détourner certaines unités aériennes allemandes, constituaient essentiellement des opérations de diversion. Ce qui primait pendant l’été 1940, c’était la défense des Iles Britanniques, et cette tâche incombait principalement aux chasseurs de la R.A.F.