La mère de famille, une fois veuve, occupe alors dans la famille une place privilégiée. Elle ne retombe pas sous la coupe des hommes de la famille et bénéficie même d’une certaine autonomie financière.
Aux deux extrémités de sa vie, la femme inspire moins de méfiance : lorsqu’elle est petite fille ou pucelle (jeune fille), et lorsqu’elle a pris de l’âge.
Le veuvage, en particulier, lui assure la liberté. Après la ménopause on ne craint plus le désir dévorant dont on la croyait habitée auparavant. Elle occupe alors dans la famille, notamment par rapport à son ou ses fils, une position privilégiée, elle ne retombe pas sous la coupe des mâles de la famille.
La mère de famille, débarrassée de son mari, exerce un véritable pouvoir sur son entourage, de plus on l’entoure d’attentions, on la respecte, on lui demande conseil. Elle bénéficie d’une autonomie financière grâce au douaire, la part du patrimoine conjugal qui lui a été accordée lors de son mariage. Mariée, la femme disposait de ce bien sous le contrôle de son époux, en particulier pour ses aumônes et ses dons à l’Eglise, une dépense importante pour les deux sexes dans la société médiévale. Cette liberté devient complète dans le veuvage.
Même s’il n’est pas commun au Moyen Age de choisir ou de refuser un époux, le cas d’Aliénor n’est pourtant pas isolé, cette possibilité de décider n’étant cependant que très rare et réservée à l’élite. C’est le cas pour Elisabeth de Thuringe, morte en 1231. Veuve à 20 ans et mère de trois enfants, elle souhaite alors mener sa vie comme elle l’entend et refuse de se remarier, malgré les nombreux prétendants et la pression de sa famille.
Il en va de même pour Isabelle de France la Bienheureuse (1225-1270), arrière-petite-fille d’Aliénor par sa mère Blanche de Castille, et qui semble avoir hérité du caractère de son aïeule. Elle se tourne dès son plus jeune âge vers une vie pieuse et re fuse plusieurs prétendants dont Conrad, fils de l’empereur Frédéric II, et Hugues XI de Lusignan. Elle choisit de se tourner vers le couvent et fonde elle-même celui des clarisses de Longchamp en 1259, avant de s’y retirer en 1263.