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Attaque et contre-attaque
vers la Haie-sainte

Bataille de Waterloo
18 juin 1815

Tandis que Jérôme Bonaparte s'acharne sur le château d'Hougournont sans pouvoir l'enlever, Napoléon lance sur le centre et la gauche des Anglais le 1er corps de Drouet d'ErIon. Mais l'espace est étroit, ce qui rend le feu anglais meurtrier. De plus, Wellington lance à son tour ses dragons gris d'Écosse, qui sabrent les Français. Au même moment surgit sur la droite de Napoléon le 4e corps des Prussiens.

L'asaut de l'infanterie du comte d'Erlon

infanterie française à waterloo
Il était environ 13h30. L'empereur envoya à Ney l'ordre d'attaquer. La batterie de quatre-vingts pièces commença avec le fracas du tonnerre un feu précipité auquel répondit l'artillerie anglaise. Après une demi-heure de canonnade, la grande batterie suspendit un instant son tir pour laisser passer l'infanterie de d'Erlon. Les quatre divisions marchaient en échelons par la gauche, à 400 mètres d'intervalle entre chaque échelon. La division Allix formait le premier échelon, la division Douze-lot le deuxième, la division Marcognet le troisième, la division Durutte le quatrième. Ney et d'Erlon conduisaient l'assaut.

Irrités de n'avoir point combattu l'avant-veille, les soldats brûlaient d'aborder l'ennemi. Ils s'élancèrent aux cris de : Vive l'empereur et descendirent dans le vallon sous la voûte de fer des boulets anglais et français qui se croisaient au-dessus de leurs têtes, nos batteries rouvrant le feu à mesure que les colonnes atteignaient l'angle mort.
La tête de la division Allix (brigade Quiot) se porta, par une légère conversion à gauche, contre le verger de la Haye-Sainte, d'où partait une fusillade très nourrie. La brigade Bourgeois, formant seule désormais l'échelon de gauche, continua sa marche vers le plateau. Les soldats de Quiot débusquèrent vite du verger les compagnies allemandes et assaillirent la ferme. Mais, pas plus qu'à Hougoumont, on ne s'était avisé de faire brèche à ces bâtiments avec quelques boulets.
Les Français tentèrent vainement plusieurs assauts contre les hautes et solides murailles, à l'abri desquelles les Allemands du major Baring faisaient un feu meurtrier. Un bataillon tourna la ferme, escalada les murs du potager, délogea les défenseurs qui rentrèrent dans les bâtiments ; mais il ne put non plus démolir les murailles à coups de crosse de fusil.

La victoire paraît certaine

A l'est de la route, les autres colonnes de d'Erlon avaient gravi les rampes sous le feu des batteries, des balles du 95e anglais et de la fusillade de la brigade Bylandt, déployée en avant du chemin d'Ohain. La charge bat, le pas se précipite malgré les hauts seigles qui embarrassent la marche, malgré les terres détrempées et glissantes où l'on enfonce et où l'on trébuche. Les Vive l'empereur couvrent par instants le bruit des détonations. La brigade Bourgeois (échelon de gauche) replie les tirailleurs, assaille la sablonnière, en déloge les carabiniers du 95e, le rejette sur le plateau, au-delà des haies, qu'elle atteint dans sa poursuite. La division Donzelot (deuxième échelon) s'engage avec la droite de Bylandt, tandis que la division Marcognet (troisième échelon) s'avance vers la gauche de cette brigade. Les Hollando-Belges lâchent pied, repassent en désordre les haies du chemin d'Ohain et, dans leur fuite, rompent les rangs du 28e anglais. De son côté, Durutte, qui commande le quatrième échelon, a débusqué de la ferme de Papelotte les compagnies légères de Nassau ; il est déjà à mi-côte, menaçant les Hanovriens de Best.

Dans l'état-major impérial on juge que « tout va à merveille ». En effet, si l'ennemi conserve ses postes avancés de Hougoumont et de la Haye-Sainte, ces postes sont débordés, cernés, et le centre gauche de sa ligne de bataille se trouve très menacé. Les cuirassiers de Travers et les tirailleurs de d'Erlon semblent couronner le plateau, le gros de l'infanterie les suit de tout près. Que ces troupes fassent encore quelques pas, qu'elles se maintiennent sur ces positions pour donner le temps à la cavalerie de réserve « d'asséner le coup de massue », et la victoire paraît certaine.

La charge des dragons de Ponsonby

charge des dragons écossais à Waterloo
En même temps, La brigade de dragons de Ponsonby s'était élancée contre les colonnes de d'Erlon. Les Royaux débouchent de la route de Bruxelles, bousculent la brigade Bourgeois aux prises avec le 95° embusqué derrière les haies et la repoussent jusqu'à la sablonnière. Ils franchissent le chemin par les ouvertures pratiquées dans la double haie pour le tir des pièces, et assaillent la colonne de Donzelot. Les Ecossais-Gris, ainsi nommés à cause de la robe de leurs chevaux, arrivent au dos des bataillons de Pack, qui ouvrent leurs intervalles pour les laisser passer. Les cavaliers fondent avec impétuosité sur la division Marcognet. Fusillées de front par l'infanterie, chargées sur les deux flancs par la cavalerie, paralysées par leur presse même, les lourdes colonnes françaises ne peuvent faire qu'une pauvre résistance.
Les hommes refluent les uns sur les autres, se serrent, se pelotonnent au point que l'espace leur manque pour mettre en joue et même pour frapper à l'arme blanche les cavaliers qui pénètrent dans leurs rangs confondus. Les balles sont tirées en l'air, les coups de baïonnettes, mal assurés, ne portent point. C'est pitié de voir les Anglais enfoncer et traverser ces belles divisions comme de misérables troupeaux. Ivres de carnage, s'animant à tuer, ils percent et taillent joyeusement dans le tas. Les colonnes se rompent, se tronçonnent, s'éparpillent, roulent au bas des rampes sous le sabre des dragons. La brigade Bourgeois, qui s'est ralliée à la sablonnière, est mise en désordre et entraînée par les fuyards et les cavaliers pêle-mêle.

Emportés par leurs chevaux, à qui, dit-on, ils avaient reçu l'ordre d'enlever les gourmettes, excités eux-mêmes par la course, le bruit, la lutte, la victoire, les Anglais traversent le vallon à une allure furieuse et s'engagent sur le coteau opposé. En vain lord Uxbridge fait sonner la retraite, ses cavaliers n'entendent rien ou ne veulent rien entendre et gravissent au galop les positions françaises. Ils n'y peuvent mordre. Ils sont décimés par le feu de la division Bachelu, établie près du mamelon à l'ouest de la grande route. Les cavaliers anglais rencontrent à mi-côte deux batteries divisionnaires, sabrent canonniers et conducteurs, culbutent les pièces dans un ravin, puis assaillent la grande batterie. Les lanciers du colonel Martigue les chargent de flanc et les exterminent, tandis que ceux du colonel Brô dégagent la division Durutte de l'étreinte meurtrière des dragons de Vandeleur.

La belle charge des lanciers fut bientôt appuyée par la brigade de cuirassiers du général Farine. L'empereur, apercevant les Ecossais-Gris prêts à aborder la grande batterie, avait fait porter l'ordre au général Delort, divisionnaire de Milhaud, de lancer contre eux deux régiments. Lanciers et cuirassiers balayèrent le versant de la Belle-Alliance, le vallon tout entier et poursuivirent les gardes à cheval et les dragons jusqu'aux premières rampes de Mont-Saint-Jean, au-delà de la Haye-Sainte.
Il y eut un arrêt dans l'action. De part et d'autre, on regagnait ses positions. Les versants des collines, l'instant d'avant couverts de combattants, n'étaient plus occupés que par des cadavres et des blessés. « Les morts, dit un officier anglais, étaient en maint endroit aussi serrés que des pions renversés sur un échiquier. » C'était l'aspect désolé d'un lendemain de bataille, et la bataille commençait seulement.

La contre attaque des Anglais de Picton

La vicieuse ordonnance des colonnes de d'Erlon, qui déjà avait alourdi leur marche et doublé leurs pertes dans la montée du plateau, allait entraîner un désastre. Après que les tirailleurs eurent culbuté les Hollandais de Bylandt, la division Donzelot s'avança jusqu'à trente pas du chemin. Là, Donzelot arrêta sa colonne pour la déployer. Pendant l'escalade, les bataillons avaient encore resserré leurs intervalles. Ils ne formaient plus qu'une masse. Le déploiement ou plutôt la tentative de déploiement, car il ne semble pas que l'on ait réussi à l'exécuter, prit beaucoup de temps, chaque commandement augmentait la confusion. L'ennemi profita de ce répit.
Quand les batteries françaises avaient ouvert le feu, la division Picton (brigades Kempt et Pack) s'était reculée, sur l'ordre de Wellington, à 150 mètres du chemin. Les hommes étaient là, en ligne, mais couchés afin d'éviter les projectiles. Picton voit les Hollandais en déroute et les tirailleurs français traverser les haies et s'avancer hardiment contre une batterie. Il commande : « Debout » et porte d'un bond la brigade Kempt jusqu'au chemin. Elle replie les tirailleurs, franchit la première haie, puis, découvrant la colonne de Donzelot, occupée à se déployer, elle la salue d'un feu de file à quarante pas. Fusillés à l'improviste, surpris en pleine formation, les Français font d'instinct, involontairement, un léger mouvement retrograde. Picton, saisissant la minute, crie :
« Chargez Chargez ! Hourrah ! » Les Anglais s'élancent de la seconde haie et se ruent, baïonnettes en avant, contre cette masse en désordre qui résiste par sa masse même. Repoussés plusieurs fois, sans cesse ils renouvellement leurs charges. On combat de si près que les bourres restent fumantes dans le drap des habits. Durant ces corps-à-corps, un officier français est tué en prenant le drapeau du 32e régiment, et l'intrépide Picton tombe raide mort, frappé d'une balle à la tempe.
bas
Que fait Napoléon pendant la bataille ?

Pendant toute la journée fatale, Napoléon n'a pas semblé au
mieux de sa forme. Plusieurs témoins ont raconté qu'il
reste dans une sorte d'apathie, ce qui avait déjà été le cas le
jour de la bataille de la Moskova (7 septembre 1812).

On conjecture depuis sur la nature du mal qui l'avait frappé.
ll est certain qu'il avait pris froid les jours précédents, marqués par de violents orages suivis de fortes chaleurs.
Pour le reste, on ignore la nature exacte de l'indisposition qui le rendit si peu enthousiaste, même si de douloureuses hémorroïdes (affection courante chez les cavaliers) ont été évoquées plus tard par les généraux Gourgaud et Bertrand .
On a aussi parlé d'une crise de dysurie, affection qui le poursuivait depuis des
années. Quoi qu'il en soit, Henry Boucquéau. le propriétaire
de la ferme du Caillou, où avait été installé son quartier géné-
ral, le vit « gêné dans ses mouvements, embarrassé dans sa démarche et écartant les jambes ». Et de fait, il ne monta
quasiment pas à cheval de la journée.
Il resta en retrait des opérations, ce qui est fâcheux pour un commandant en chef un jour pareil. Il laissa Ney prendre des décisions qui auraient
normalement relevé de sa seule compétence, dicta des ordres
peu clairs et aurait mal lu les (mauvaises) cartes à sa disposi-
tion.
De quoi expliquer une partie des causes de la défaite,
sans autant minimiser l'excellence du choix tactique de
Wellington et la ponctualité de Blücher.