Les sabotiers "taillaient" en pouces et en lignes. La valeur
unitaire du pouce correspondait à un quatre de nos pointures, soit 2,70 centimètres. Un sabot de dix pouces équivalait donc à une actuelle chaussure de quarante. Douze pouces faisaient un pied. Il était recommandé de choisir des sabots d'une pointure supérieure, quand on en achetait une paire neuve, afin de compenser la réduction du bois au séchage. La ligne, qui était le douzième du pouce, servait à mesurer les lames des outils tranchants. Un sabot devait être chaussant, s'ajuster au cou-de-pied, ne
point déformer la marche, ne provoquer ni
calas ni durillons. Il ne devait jamais alourdir la jambe des charretiers, ne pas donner
l'air pataud aux gourgandines qui dansaient la gaillarde. Un sabot ne s'adapte pas au pied de celui qui le porte, au contraire d'un soulier il doit convenir dès l'essayage. Le sabotier
connaissait ses bons clients jusqu'au bout des
doigts de pieds.
La durée d'une paire de sabots variait entre quatre et huit semaines. Elle dépendait de plusieurs choses: de la façon de marcher et de l'habitude qu'on avait ou non de traîner les pieds, bien évidemment, mais aussi du climat de la saison (les semelles s'usaient rapidement en période de sécheresse, mais l'humidité les détériorait encore plus vite ), de l'état des chemins et des sols (la caillasse et la pierraille râpaient le bois), des travaux auxquels on e livrait. Un paysan usait six paires de sabots dans l'année, souvent plus que moins. On éclatait un dessus en butant
contre une pierre, on cassait un talon en frappant de la semelle. Afin de faire
durer les sabots et pour qu'ils ne se fendissent pas, on en renforçait les semelles avec des clous, des fers, des bandes de tôle ou du gros cuir découpé dans de vieux harnais.