Le Maréchal Ferrand
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La plupart des maréchaux ne ferraient que pendant la matinée. Ils réservaient leurs après-midis aux travaux de forge, aux réparations des charrues. Les premiers chevaux arrivaient à la maréchalerie dès la pointe de l'aube, le plus tôt possible, afin de ne rien gaspiller de la pleine journée. L'ouvrage nécessitait l'effort conjugué de deux personnes.
'Pendant que le maréchal oeuvrait, le client tenait les pieds de l'animal. Un artisan émérite, en une heure, ferrait les quatre jambes d'un cheval. Le ferrage était une opération compliquée et dangereuse. Le plus difficile consistait à ferrer les pieds de devant, qu'il fallait maintenir pliés à l'aide d'une courroie passée dans le crochet du collier.
Le ferrage des sabots de derrière était relativement plus facile. Le teneur s'accotait contre la fesse de la bête, bien d'aplomb sur ses jambes écartées, et soulevait le pied avec la courroie enroulée dans ses mains. Le maréchal travaillait constamment courbé, sa boîte à ferrer à portée de main .
La simple longe attachée à un anneau du mur ne suffisait pas toujours à immobiliser un cheval. On le maîtrisait alors avec un serre-nez, long bâton terminé par une boucle de corde que l'on vrillait dès que l'animal renâclait. Quand une carne semblait par trop récalcitrante, on la poussait dans une sorte de cage fabriquée à cet effet par le charron.

Tout d'abord le maréchal débrochait le fer usagé et l'arrachait avec les tricoises, puis il éliminait l'excédent de corne à l'aide d'une lame, appelée "rogne-pied", et d'une mailloche. II nettoyait aussi le dessous du sabot à la rénette et en râpait les côtés. Le maréchal disait qu'il "parait". Un pied de devant était posé sur un trépied : la "biquette" ; un de derrière, relevé à la courroie.
Le fer chauffait entre-temps sous le charbon ravivé au soufflet. Le maréchal ne le présentait que lorsqu'il virait au rouge sombre. C'était l'ajustage. Il fallait faire vite de façon que le fer égalise la sole sans en brûler la corne. Au besoin on le corrigeait sur l'enclume pour qu'il porte bien. Enfin on l'appliquait. (Le fer devait s'adapter à la forme du pied, non l'inverse: les mauvais ouvriers trichaient en taillant la muraille du sabot.)
Le fer refroidi et mis en place, le brochage suivait aussitôt. Les clous à tête carrée étaient enfoncés dans la corne qu'ils transperçaient. Le maréchal en coupait la pointe avec ses tenailles, puis il les dégorgeait, c'est-à-dire qu'il encochait le sabot pour que l'extrémité des clous, repliée au brochoir, ne dépasse point. Un coup de lime fignolait le boulot et donnait le fil d'argent. La main ne devait pas sentir le clou à la caresse du sabot

Un cheval qu'on piquait malencontreusement au brochage était une bête qui souffrait. On ferrait en principe les pieds deux à deux pour ne pas déséquilibrer la marche du cheval. Souvent on changeait les quatre fers à la fois. [Le maréchal] regar dait toujours s'éloigner l'animal qu'il venait
de ferrer, comme pour se convaincre, en suivant son encensement régulier, qu'il n'avait point salopé l'ouvrage.
Un clou de ferrure, incorrectement enfoncé dans le sabot, provoquait une blessure qu'on appelait une enclouure; il fallait le retirer sans barguigner. Un cheval solbatu (déformation de sole battue) était un animal qui boitait, à cause d'un fer qui le blessait au pied.
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