Dönitz conserve la confiance
absolue de ses hommes

Les U-Boote
La terreur des convois

L'amiral Dönitz est un militaire que l'on identifie à sa spécialité. Nelson symbolise la marine, Guderian les blindés, et Dönitz les U-Boote et ses sous-mariniers. Technicien émérite, bon stratège et fin politique, Dönitz, s'il avait été écouté plus tôt, aurait pu
changer le cours de la guerre.
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A la limite de la mission impossible

sous-mariniers allemands à l'entraînement
En septembre 1939, la guerre surprend la Kriegsmarine dans un état de totale impréparation. La situation des sous-marins est particulièrement critique ; sur les cinquante-sept unités dont dispose Dönitz , seules 18 sont de type océanique. Ce qui signifie que seulement cinq à sept unités sont opérationnelles. Les autres sont en transit aller ou retour. Ce contexte de mission impossible sera jusqu'à la fin celui de Dönitz et de ses hommes. En attendant ces événements, la première tâche à laquelle se consacre Dönitz est la formation opérationnelle de ses sous-mariniers. N'ayant reçu aucune directive, il forge l'arme sous-marine selon ses idées et ses buts. D'où l'identification profonde entre l'U-Bootwaffe et Dönitz.
Les premiers officiers-instructeurs de l'arme sous-marine renaissante sont, en 1935, Dönitz lui-même et l'ingénieur mécanicien Thedsen. Ils communiquent leur foi en l'arme sous-marine à une époque ou certains la disent périmée en raison des progrès des moyens de défense. Cette impulsion initiale est déterminante. Elle donnera une première génération de commandants de grande qualité. La formation des sous-mariniers à pour but de leur donner une maîtrise parfaite de leur navire dans toutes les circonstances. L'entraînement doit procurer aux officiers et aux équipages un enthousiasme et une confiance absolue envers leur arme, malgré l'Asdic. Cet entraînement doit être aussi proche que possible des conditions opérationnelles.
Pendant six mois, l'équipage subit un entraînement intensif, fondé sur un degré de répétitions difficilement supportable à moins d'être très motivé. Les instructeurs simulent toutes sortes de pannes et d'avaries. L'équipage doit aussi bien maîtriser les aspects techniques, délicats à bord d'un sous-marin, que les aspects tactiques. En effet, la maîtrise de la navigation à bord d'un sous-marin est en soi un exercice compliqué. La formation se termine par un exercice tactique regroupant de dix à quatorze U-Boote, devant attaquer un convoi fortement protégé, survolé par une aviation longtemps bien supérieure en nombre à celle des convois alliés. Le futur amiral Topp, l'un des meilleurs sous-mariniers de Dönitz, commandera ce convoi. Pour Dönitz seuls des sous-mariniers confirmés peuvent assurer le passage de la pratique à la théorie, et transmettre ainsi leur expérience.

Une petite équipe très efficace

Dönitz et l'organisation du commandement de l'arme sous-marine
L'organisation du commandement de l'arme sous-marine est réalisée avec des moyens très réduits, très simples, d'une grande sobriété et d'une efficacité remarquable, totalement différente de celle des états-majors alliés. Dönitz se contente de deux adjoints : l'un pour les opérations, l'autre pour le reste. Le plus souvent, l'amiral Dönitz pilote lui-même les principales attaques, avec un état-major de six officiers, dirigés pendant toute la guerre par le contre-amiral Godt.
Les officiers de l'état-major de Dönitz sont constamment sous pression et d'autant plus qu'ils connaissent bien leurs frères d'armes au combat. Ces officiers sont des sous-mariniers confirmés. Les plus connus sont le capitaine de corvette Hessler, gendre de l'amiral, qui a coulé 120000 tonnes en 1941, et le lieutenant de vaisseau Schnee qui a coulé 100 000 tonnes en deux ans. Tous les matins, la conférence d'état-major est présidée soit par Dönitz soit par l'amiral Godt, la cheville ouvrière de ce PC. Ce dernier est chargé, entre autres, de la difficile coordination avec les autres commandements et les alliés de l'Axe. Godt est le responsable de l'organisation de la recherche des convois et du regroupement des meutes pour l'attaque, ce qui implique le suivi individuel de plusieurs dizaines d'unités.
Dönitz prend la direction des opérations dans quelques affaires chaudes, comme en mars 1941 lors de la bataille des convois SC 122 et HX 229, et reste alors des heures dans son PC. Un autre état-major tout aussi mince, sous les ordres de l'amiral von Friedebourg, gère notamment la formation dispensée par des officiers ayant commandé à la mer.
Dönitz considère que la symbiose entre les opérations et la formation est indispensable pour disposer d'équipages du niveau requis. Le contact direct avec les équipages l'occupe beaucoup. L'amiral est très présent auprès de ses équipages, de telle sorte que chaque homme peut se sentir personnellement engagé par lui. Le lien entre les hommes et leur chef est à la base de la cohésion de l'arme sous-marine.
L'équipage est d'abord une équipe partageant la même vie, dans le même inconfort et les mêmes risques. L'amiral sait par expérience l'importance de cet état d'esprit et la force qu'il suscite. Aussi, dès un retour de croisière, l'amiral s'entretient avec les commandants des conditions du combat et des problèmes de vie courante. Ce qui lui permet d'analyser très vite les changements intervenus dans la tactique des escortes ou dans celle de l'aviation. Il lui est ainsi possible d'émettre rapidement de nouvelles directives aux U-Boote, aux ingénieurs chargés de la maintenance ou de la construction, et aux instructeurs formant les nouveaux équipages.
Tenu au courant par radio des péripéties vécues par chaque sous-marin à la mer, Dönitz les encourage au combat et leur envoie les félicitations en cas de succès. Il fait préparer à l'avance les décorations, de telle sorte qu'elles soient remises dès l'arrivée du bâtiment. Son austérité prussienne se double d'un certain paternalisme. Il maîtrise ses sentiments en voyant l'état dans lequel reviennent ses équipages, mais fait ce qu'il peut pour améliorer leur sort.

Une caisse noire pour ses hommes

Les sous-mariniers sont des privilégiés, à la mesure des risques courus et de leur importance stratégique : ce sont les hommes les plus décorés de l'armée allemande. Ils bénéficient de facilités inconnues du reste de la Wehrmacht et de l'allemand moyen de l'époque. L'amiral maintient le contact entre les équipages et leurs familles, et des messages annoncent les naissances ou règlent la procédure des mariages par procuration. Sa caisse noire renfloue parfois les finances délabrées d'un commandant de U-Boot désireux d'aller tirer une bordée à Paris.
Tout ceci fait partie d'un système dans lequel le souci d'être efficace s'allie à un réel attachement de Dönitz pour ses hommes. Car malgré des pertes, qui deviennent effroyables à partir du milieu de l'année 1943, le lien affectif entre l'amiral Dönitz et ses hommes, le moral et la pugnacité, restent intacts.
Les obsèques de l'amiral, en 1981, bien des années après la guerre, donnent une idée de la force de la relation affective qui le liait aux sous-mariniers. La cérémonie privée fut suivie par des milliers d'anciens de l'U-Bootwaffe venus en civil comme il leur avait été demandé par la délégation officielle de la Bundeswehr.
Dönitz et les sous-mariniers