Otto Kretschmer
le roi du silence

Les grands As
des U-Boote

Le champion de l’arme sous-marine pendant la deuxième guerre mondiale est né le 1er mai 1912 à Heidau. Fils de professeur, il est envoyé à l’âge de 17 ans passer huit mois à Exeter, en Angleterre, où il apprend à parler parfaitement l’anglais. Passionné depuis toujours par la mer, il entre dans la Reichsmarine le en 1930, un mois avant ses 18 ans.
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Son surnom: Otto le silencieux

Otto Kretschmer dit Otto le silencieux
Otto Kretschmer obtient son premier commandement sur le U-23 en octobre 1937. Pendant plus d’une année, il va entraîner son équipage sur ce Typ IIB côtier de 279 tonnes (en surface) et acquérir la réputation du meilleur torpilleur de la Kriegsmarine. Il est élevé au grade de Kapitänleutnant en 1939. La guerre ayant éclaté, il effectue ensuite ses premières patrouilles de combat au nord des îles britanniques.
La réglementation internationale précise notamment qu’il est illégal de couler un bâtiment d’un pays non belligérant transportant du matériel pour un pays ennemi sans avoir préalablement mis son équipage et ses passagers en sécurité. Cette restriction oblige les sous-marins à effectuer leurs attaques de jour pour s’assurer de la nationalité du navire, ce qui est risqué... Ainsi, après son premier torpillage réussi le 4 octobre 1939, Kretschmer fait surface (à proximité des côtes anglaises) pour demander aux naufragés dans leur canot si certains sont blessés ; à de nombreuses reprises par la suite, ce commandant marquera sa compassion envers ses victimes.
En huit campagnes de combat (dont deux missions de mouillage de mines), il réussit à couler sept marchands, dont un pétrolier de plus de 10 000 tonnes, ainsi qu’un destroyer britannique ; avec ces résultats, Otto Kretschmer est décoré de la Croix de fer de 2e puis de 1re classe.
À cette époque, le U-23 agit seul, tel un loup isolé. Discret à la radio pour éviter tout repérage (d’où son surnom d’« Otto le silencieux »), Kretschmer n’est pas dénué d’humour : lors d’une patrouille, il lance une torpille sur un rocher qu’il a pris de loin pour un croiseur ; plutôt que de garder cela pour lui, il fait envoyé le message « rocher torpillé mais pas coulé ». Pensant que le radio a fait une erreur sur la première lettre, son récepteur procède à une correction – « Nelsen torpediert... » – avant de transmettre le message à Dönitz, qui croit alors qu’il s’agit du cuirassé britannique Nelson... À son retour en Allemagne, Kretschmer et Dönitz rient de ce quiproquo, mais s’empressent surtout de signaler au ministère de la Propagande de ne pas communiquer de bulletin de victoire !

Une torpille, un navire

Le 18 avril 1940, Kretschmer reçoit le commandement du U-99
Le 18 avril 1940, Kretschmer reçoit le commandement du U-99, un Typ VIIB de 753 tonnes (en surface). Une nuit, lors des traditionnels essais en mer Baltique avec un faux convoi composé de navires allemands, il perce le rideau des escorteurs en surface et mène un torpillage factice contre les cargos, en se plaçant au milieu du convoi, entre les marchands : il vient d’inventer une nouvelle tactique ! Au port de Kiel, la découverte d’un fer à cheval accroché à l’ancre est considérée comme un présage de chance : l’emblème du U-99 vient d’être trouvé, ce sera un fer à cheval apposé sur le kiosque !
Alors que la réglementation sur les prises est abandonnée le 24 mai 1940, le U-99 part pour sa première mission de combat le 18 juin. Au 21 juillet, terme de sa seconde patrouille qui le mène jusqu’à Lorient, son nouveau port d’attache, il a coulé six navires ; le sous-marin s’étant approché à plusieurs reprises des naufragés pour leur laisser du brandy ou des couvertures.
Le 4 août, Otto Kretschmer est le 7e officier de l’arme sous-marine à recevoir la Ritterkreuz. Le 17 août, la dernière restriction à la guerre sous-marine est levée, c’est désormais le blocus total des côtes britanniques : même les bâtiments des pays neutres se trouvant dans ce secteur seront coulés à vue. Kretschmer utilise sa tactique d’attaque des convois de nuit en surface, en se glissant à l’intérieur du convoi, avec une devise : « Une torpille, un navire ». Les U-Boote vont vivre jusqu’à la fin de l’année ce que leurs commandants appelleront les « jours heureux » ou le « premier âge d’or », à un tel point que le commandant du U-99 déclarera : « Nous étions comme des écoliers au moment de Noël. » En quelques heures le 21 septembre, il coule ainsi trois marchands du convoi HX-72 pour 17 978 tonnes !

Le meilleur de mes élèves

Les trois « As » Prien, Kretschmer et Schepke, qui font partie de la même 7e flottille et ont été décorés de la Croix de chevalier, se connaissent très bien. Du 26 septembre au 12 octobre 1940, c’est la première fois depuis leur départ d’Allemagne qu’ils peuvent se retrouver à terre ; ils arrosent l’événement au restaurant « Chez Mélanie » à Riec-sur-Belon et se questionnent : qui d’entre eux aura le premier les Feuilles de chêne ?
Ce sera Günther Prien, commandant du U-47, décoré le 20 octobre 1940. Ses deux camarades ne tarderont pas à le rattraper, car ils participent au même moment aux premières attaques de meute vraiment réussies contre les convois SC-7 et HX-79 : entre le 17 et le 20 octobre, sept U-Boote détruisent 33 bâtiments de ces deux convois. À lui seul, le U-99 coule trois navires du SC-7 en deux heures le soir du 18 octobre, puis trois autres aux premières heures du lendemain ! Entre le 23 et le 30 octobre, les trois as se réunissent pour la dernière fois à Lorient pour fêter la décoration de Prien. Schepke lance alors un défi amical : il offrira le champagne à ceux qui arriveront avant lui à atteindre les 250 000 tonnes de bateaux coulés !
Le second à recevoir les Feuilles de chêne est Otto Kretschmer, le 4 novembre, suivi par Joachim Schepke le 1er décembre. Le plus grand exploit de Kretschmer est sans nul doute le torpillage des trois croiseurs marchands britanniques armés Laurentic, Patroclus et Forfar entre le 3 novembre et le 2 décembre, pour un total de plus de 46 000 tonnes. Le 12 décembre, le U-99 arrive à Lorient pour une révision complète, qui va durer plus d’un mois et demi. Otto Kretschmer donne alors trois semaines de permission à ses hommes et leur laisse le choix : rester dans la région et profiter des stations balnéaires de Quiberon ou de Carnac, ou l’accompagner au ski en Silésie ; ils peuvent même y emmener leur compagne s’ils le désirent. Le lendemain soir de son arrivée, Kretschmer est invité à dîner à Kernevel chez Dönitz.
Pour tous les commandants habitués aux festins traditionnels aux retours de mission, c’est toujours un moment pénible, car l’amiral se fait un devoir de ne pas servir à sa table davantage que la ration autorisée pour les civils en Allemagne ! Devant se rendre à Cologne le lendemain, Dönitz propose à Kretschmer de l’accompagner dans sa propre voiture. Il a en fait une idée derrière la tête : pendant le trajet, il veut convaincre celui qu’il appelle affectueusement « le meilleur de mes élèves » de prendre un commandement à terre. Mais Kretschmer, qui a toujours été en mer depuis le début des hostilités, refuse la proposition. Lors de son séjour au ski à la montagne, un éditeur allemand lui demande de publier ses mémoires, comme l’ont déjà fait Prien et Schepke ; mais Kretschmer, plutôt discret, s’y refuse, malgré les souhaits de certains dignitaires pour favoriser le recrutement dans la U-Bootwaffe. Il acceptera seulement si Dönitz lui en donne l’ordre ! Or, un quiproquo au sein de l’état-major de Dönitz, qui appuie toujours ses commandants, fait qu’un tel ordre arrive réellement... Kretschmer est alors interviewé, mais il ne donnera que des informations brèves et peu détaillées sur ses missions...
L'as de U-Boot Kretschmer

La mort de Schepke et la capture de Kretschmer

la capture de Kretschmer par les Anglais
Lorsque le U-100 de Schepke part de Kiel le 9 mars 1941, Prien a déjà disparu depuis deux jours avec tout son équipage. Le 7 mars au matin, le U-47 a endommagé deux navires du convoi OB-293 avec ses deux dernières torpilles : les deux proies sont coulées peu après par le U-99. Sur indication du U-110 qui a découvert le convoi HX-112 le 15 mars, plusieurs U-Boote se dirigent vers lui, notamment les U-99 et U-100. Mais le message radio est incomplet : il indique que seuls deux destroyers escortent le convoi. Or, en réalité, sa surveillance est effectuée par le 5th Escort Group comprenant cinq destroyers et deux corvettes ! Si le U-99 arrive à couler cinq navires du convoi, dont quatre en quelques heures le 16 mars, le U-100 est tenu à l’écart par les escorteurs. Après avoir subi un sérieux grenadage de la part du destroyer HMS Walker, le U-100 est obligé de faire surface une heure et demie plus tard. Son commandant pense être en sécurité dans l’obscurité et espère pouvoir s’échapper discrètement en surface ; c’est alors qu’il est repéré au radar dans la nuit du 16 au 17, à 03h18, par le HMS Vanoc, qui le prend en chasse et l’éperonne ! Schepke, qui se trouve sur le kiosque, est tué sur le coup ; il n’y a que six survivants. C’est la première fois qu’un radar permet à un escorteur de couler un U-Boot en surface en pleine nuit.
Aussitôt après, le U-99 en plongée est repéré à l’ASDIC par le HMS Walker : des grenades bien placées l’obligent à faire surface... où il est pris sous le tir des canons !
Le submersible commence à couler, et Kretschmer n’a plus aucune marge de manœuvre : en anglais, il demande aux Britanniques de sauver son équipage ; 40 des 43 sous-mariniers sont ainsi récupérés pour être internés à Liverpool, où commencera leur captivité à terre. Kretschmer a gagné le « pari des As » : il a atteint les 250 000 tonnes de navires alliés coulés, et, pour avoir essayé de faire de même, les deux autres parieurs y ont laissé la vie... Les Britanniques vont instrumentaliser la capture de Kretschmer et la disparition de Schepke dans le cadre de leur propagande.
Dès le 20 mars, l’événement est annoncé par Churchill devant la Chambre des Communes, et les journaux reprennent tous l’événement avec de gros titres. Chez les Allemands, c’est la consternation ; la nouvelle de la disparition de Prien n’est d’ailleurs officiellement divulguée au public que le 23 mai 1941. Après la guerre, dans ses mémoires, Churchill écrira : « Le 8 mars, le U-47 de Prien était coulé avec tout son équipage par le destroyer Wolverine, et neuf jours plus tard les U-99 et U-100 étaient coulés lors d’une attaque combinée contre un convoi. Tous étaient commandés par de remarquables officiers, et l’élimination de ces hommes très valables a eu un effet déterminant dans notre lutte. Peu de commandants qui les suivront atteindront leur incroyable niveau de capacité et d’audace. »