Premières reculades

Les accords de Munich

Chamberlain rencontre Hitler à Godesberg, le 22 septembre 1938, et celui-ci réclame la totalité des Sudètes. La guerre semble imminente. La France rappelle ses réservistes, tandis que la Tchécoslovaquie procède à une mobolisation générale.
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Herr Hitler était un gentleman

Chamberlain et hitler en 1938
Au début de septembre, le premier ministre britannique avait décidé que le meilleur moyen de rétablir le calme dans un monde troublé était de rendre personnellement visite à Hitler. C'est dans cette disposition d'esprit qu'il atterrit à Munich, le 15 septembre 1938. Une nouvelle l'y attendait. Tandis qu'il volait vers l'Allemagne, Hitler avait augmenté ses prétentions. Il ne demandait plus l'autonomie pour les Sudètes ; il exigeait maintenant l'intégration de leur territoire au Grand Reich allemand. Chamberlain apprit, au cours de son entrevue avec le Führer, que rien d'autre ne pouvait donner satisfaction au maître de l'Allemagne. Mais il acquit aussi la certitude que si Hitler se montrait dur et impitoyable, il était pourtant « un homme à qui on pouvait se fier quand il avait donné sa parole ». A son retour, Chamberlain en donna l'assurance aux Anglais, qui furent ravis de l'entendre dire. Herr Hitler était un gentleman !...
Suivit une conférence à Londres avec MM. Daladier et Bonnet, respectivement président du conseil et ministre des Affaires étrangères. Le problème n'était pas de savoir si l'on donnerait une suite à la demande de Hitler, mais comment faire accepter cette demande au gouvernement tchèque. Ni les Français ni les Britanniques n'approuvaient l'idée d'un plébiscite qui eût permis aux habitants du pays des Sudètes de faire connaître leur désir profond, ou non, de s'intégrer au Reich allemand. Ils désiraient seulement la cession pure et simple de la zone contestée qui, soulignons-le, abritait la ligne dé fortifications défensives de la Tchécoslovaquie contre l'Allemagne.
Dans la matinée du 21 septembre, les représentants français et anglais à Prague avertissaient le président Benès qu'il devait se soumettre aux exigences de Hitler et que toutes les zones de Tchécoslovaquie contenant plus de 50 % d'Allemands devaient être livrées « avant que se crée une situation dans laquelle la France et l'Angleterre ne pourraient avoir aucune responsabilité ». Voilà comment les grandes démocraties protégeaient leurs soeurs plus faibles !

C'est un premier ministre désemparé qui regagna l'Angleterre

Le 22 septembre, Chamberlain prit de nouveau l'avion pour s'entretenir avec le Führer, qui, cette fois, se rendit aimablement à sa rencontre dans un hôtel de Godesberg. Hitler écouta la déclaration de Chamberlain l'informant que la France et l'Angleterre avaient recommandé de satisfaire à ses exigences, puis, après l'avoir remercié courtoisement, il déclara :Je suis désolé, mais ceci ne suffit plus, maintenant. D'autres pays possédant des frontières communes avec la Tchécoslovaquie lui avaient demandé que les parties de cette dernière occupées par leurs minorités respectives leur fussent également cédées, et Hitler appuyait ces revendications. Non seulement les provinces occidentales (c'est-à-dire le pays des Sudètes) devaient être livrées à l'Allemagne, mais les provinces orientales, où vivaient des Hongrois et des Polonais, devaient être cédées à leur pays d'origine.
En fait, il s'agissait d'un démembrement pur et simple de la Tchécoslovaquie.
M. Chamberlain passa les trente-six heures qui suivirent dans la contrariété, le désarroi et la honte. Il ne le cacha pas au Führer qui l'écouta le plus courtoisement du monde, mais aussi, comme on peut l'imaginer, avec un sourire quelque peu sarcastique. En tout cas, il ne montra aucune disposition à réduire ses prétentions. C'est un premier ministre désemparé qui regagna l'Angleterre, pour y constater un raidissement de l'opinion publique, attitude qui ne fit sans doute qu'accroître la déception de celui qui se considérait comme le pèlerin de la paix.

Une armée tchèque de plus d'un million d'hommes

A la suite de cette soudaine poussée de méfiance envers Hitler, on décida de rejeter les conditions de Godesberg. La Tchécoslovaquie put mobiliser sans l'opposition de la France et de l'Angleterre, et la France décréta même une mobilisation partielle. Les démocraties paraissaient enfin réagir devant le danger. Le 26 septembre, Hitler reçut un message de Chamberlain auquel il répondit par un véritable ultimatum : si le 28 septembre, à 14 heures, les Tchèques n'avaient pas accepté les revendications allemandes, les troupes du Reich pénétreraient sur le territoire des Sudètes à la date précise du 1er octobre. Cependant, dans un discours qu'il prononça trois heures plus tard, et dans lequel il s'exprima en termes violents et grossiers à l'égard de Benès et de la Tchécoslovaquie, Hitler parla en termes modérés de la France et de la Grande-Bretagne, déclarant : Ceci est la dernière réclamation territoriale que j'aie à faire en Europe.

Quoi qu'il en soit, le mercredi 28 septembre, à 14 heures, Benès n'avait toujours pas fait sa soumission à Berlin. Une armée tchèque de plus d'un million d'hommes était en place derrière une ligne puissamment fortifiée, prête à s'opposer à toute agression allemande. L'armée française était partiellement mobilisée et le gouvernement britannique avait donné l'ordre à la Royal Navy de se tenir en état d'alerte.
C'est alors qu'à 15 heures Hitler adressa un message à Chamberlain et à Daladier pour suggérer une nouvelle et immédiate entrevue.
mobilisation en France en 1938

Chamberlain devant la chambre des Communes

le Premier ministre reçut donc un télégramme de Hitler faisant part de son désir de voir Chamberlain poursuivre ses efforts pour amener les Tchèques à la raison. Plusieurs éléments nouveaux incitaient Hitler à se montrer moins pressé. Son attaché militaire à Prague avait estimé que les troupes tchécoslovaques et françaises réunies surclassaient les forces allemandes dans un rapport de 2 à 1. Son ambassadeur à Washington l'avait informé que, dans l'éventualité d'une guerre entre l'Allemagne et l'Angleterre, les États-Unis jetteraient tout leur poids dans la balance du côté de la Grande-Bretagne.
Chamberlain fut ravi du message du Führer. Sans se soucier de consulter son gouvernement, les Français ou les Tchèques, il expédia en hâte la réponse suivante: J'ai la certitude que vous pouvez obtenir l'essentiel de ce que vous voulez sans guerre et sans délai. Je ne peux croire que vous déclencheriez une guerre mondiale capable d'anéantir la civilisation, pour un retard de quelques jours concernant le règlement d'un problème qui existe de longue date.
Au cours de l'après-midi, Chamberlain s'adressa à une Chambre des Communes comble et lugubre. Les députés écoutèrent pendant quatre-vingts minutes un exposé plaintif des efforts du Premier ministre pour préserver la paix. Il n'avait pas terminé son discours qu'un huissier entra et tendit un papier à un des membres du gouvernement assis au premier rang, qui le passa immédiatement à Chamberlain. Celui-ci le prit, l'examina, sourit et dit: Je viens d'être averti que «Herr» Hitler m'invite à le rencontrer demain matin à Munich. Il a également invité Signor Mussolini et Monsieur Daladier. Signor Mussolini a accepté, et je ne doute pas que Monsieur Daladier accepte lui aussi. Je n'ai pas besoin de dire ce que sera ma réponse. La Chambre explosa de joie.