Le travail au quotidien du cantonnier
rideau
cantonnier en 1900

Avant la Grande Guerre,
Les usagers  ne se bousculaient pas sur les chemins des villages. Le cantonnier transportait ses outils dans une brouette, qu'il garait au bord du talus tant que durait son ouvrage de réfection. [...] Selon la saison, il balayait les mottes laissées par les charrues, étalait les gravillons dans les "nids de poule" ou curait les fossés en prévision des pluies. L'herbe des accotements était laissée aux paysannes, qui la faucillonnaient pour leurs lapins ou y attachaient leurs chèvres. On disait malicieusement que le cantonnier, qui rempierrait pendant l'hiver mettait "les pièces à côté des trous". Les pierres étaient fournies par les paysans, comme pendant les corvées du Moyen Age. Les trous rebouchés, le cantonnier tassait les reprises en roulant dessus un cylindre à avoine; le cheval était prêté par un paysan complaisant. Des cabanes, maçonnées ou en pierres sèches, construites çà et là sur l'accotement, permettaient aux cantonniers de s'abriter des intempéries et, la journée terminée, de ranger les outils qu'ils n'auraient pas, de la sorte, à rapporter le lendemain.

metier de cantonnier

Le travail au quotidien.
Un cantonnier avait la responsabilité d'une portion de grande voirie qui s'étirait sur une douzaine de kilomètres. A l'époque des véhicules à crottin, l'homme se contentait de signaler sa présence en plantant sur l'accotement un écriteau métallique, peint en rouge vif, sur lequel, à la craie, il indiquait le numéro de la route et la désignation du canton. Les ordres qu'il exécutait émanaient d'un supérieur hiérarchique et d'un ingénieur. C'était à bicyclette que le cantonnier chef faisait son inspection. Les gens prétendent volontiers, sur le ton de la blague, qu'un cantonnier n'a de corne qu'au menton à force de rester arcbouté, des journées complètes, du matin au soir, sur le manche de son outil. Billevesées que ça, évidemment! De la médisance pure et simple. Ceux qui racontent ce genre de sornettes en abattent souvent moins que ceux qu'ils se plaisent  tellement à critiquer.
Les axes principaux furent goudronnés dans les années 1920, mais le macadamisage du réseau secondaire ne se fit qu’après la Seconde Guerre. Si les conditions de circulation s'en trouvèrent améliorées, le boulot des cantonniers n ‘en devint pas moins pénible pour autant. Il fallait toujours rapiécer le revêtement, nettoyer les accotements, faucher les talus, faucarder et curer les fossés, prêter la main aux maçons qui construisaient les ponts d'écoulement. Les cantonniers des nationales se chargeaient, en plus, de l'élagage des alignements d'arbres et des replantations quis s’imposaient. En revanche, l'entretien des chemins vicinaux relevait des municipalités. [...] Les voies empierrées étaient plus éreintantes à entretenir que les routes goudronnées, cela va de soi. Il y avait sans cesse des ornières qui se creusaient, des trous qui s'approfondissaient, des ravinées qui s'aggravaient sous l'orage. Au dégel de chaque hiver rigoureux, les véhicules s'enlisaient dans la gadoue et ne parvenaient plus  à se tirer des bourbiers. Parfois, on devait appeler un cultivateur à la rescousse, qui rappliquait avec son cheval. Et c'était le rechargement qu'on entreprenait aussitôt, à la pelle et à la brouette, qu'il  pleuve ou qu'il vente, afin que la mésaventure ne se reproduise pas tout de suite. On tassait ensuite le raccord à la demoiselle ou au rouleau. En cas de rempierrement total, on arrosait copieusement le caillou que le cylindre s'apprêtait à compacter.

le vieux metier de cantonnier

Feuilles de route
Les rangées d'arbres, sur le talus des chemins, se composèrent d'abord d'ormeaux, que l'on nommait les "ranis". Le mot rappelait que ces alignements étaient dus à Sully, baron de Rosny-sur-Seine et ministre aux yeux duquel un supplément de bois d'oeuvre ne pouvait qu'enrichir le royaume. Sous l'Empire, les plantations d'accotement se multiplièrent le long des voies fréquentées. Il ne s'agissait plus d'un avantage économique, mais d'une réponse aux impératifs militaires. Les noyers étaient destinés à la fabrication des fûts de fusil ; les pruniers noirs devenaient des crosses de pistolet. Une armée de charrons taillait des afffuts de canon dans les marronniers et débitait les ormes tortillards en moyeux de prolonge d'artillerie. De surcroît, les feuillages de la belle saison dissimulaient le mouvement des  troupes, tout en offrant un frais ombrage aux soldats. Depuis  l'avènement de la sacro-sainte automobile, la sécurité routière a tendance à faire table rase de ces arbres qui, sur les bas-côtés, gardent la raideur des sentinelles au garde-à-vous. Les écraseurs de champignons leur reprochent  de causer un accident mortel à chaque fois qu'un de leurs bolides, dérapant par vitesse excessive, finit sa course décor.

Pas facile de retrouver une aiguille dans une botte de foin ! C'est le cantonnier, chargé de l'entretien des voies, qui s'attelle à la tâche. Pour cela, il les attire à l'aide d'un gros aimant. Pourtant, ce n'est pas ce spectacle qui rassemble les quelques Parisiens attroupés autour de lui. Le cantonnier, ils le connaissent, mais pas l'objectif du photographe, qu'ils regardent fixement..

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