Féroce et impitoyable madame Mao
Les charges sont lourdes.
Pièges, persécutions,
complot, contre les milieux
politiques, littéraires, scientifiques,
mais aussi contre les dirigeants
de l'Etat et du parti. La
lecture de l'acte d'accusation dure
trois heures. Mais Jiang Qing arbore
un sourire narquois. Elle est
contente de retrouver les projecteurs.
Elle aime ça. Le clou du spectacle
? Tentative d'assassinat sur le
président Mao Zedong. Elle invective
la trentaine de magistrats : «Comment, moi, qui ai toujours
servi la cause ?»
Jiang Qing n'est
pas une citoyenne ordinaire. C'est
la femme de feu Mao, le fondateur
de la République populaire de
Chine. Il faut dire qu'elle se voyait
bien succéder au «Grand Timonier
», elle, qui est partie de rien,
d'un père qui la battait, d'une
mère qui se faisait battre. Cela aurait
été une belle revanche sur la
vie et même sur Mao.
Quand ils se marient en 1938,
Jiang Qing est une jeune
actrice à la réputation
sulfureuse. Mais la starlette
sait faire table rase
du passé : ex-amants,
collègues, amis ... tous
sont exilés ou emprisonnés.
Elle gravit les échelons
un à un, jusqu'à se retrouver,
en 1966, dans le groupe de la Révolution
culturelle, sorte de gouvernement
secret. Dès lors, c'est elle
la révolution.
Elle qui décide de
«purifier» les arts à partir de 1967.
Elle qui décide d'éliminer ceux qui
étaient contre son arrivée à la tête
de l'industrie cinématographique.
Elle encore qui décide de faire enfermer
puis torturer Wang Guangmei,
l'andenne première dame. En
plus, Mao est malade. Elle sent
l'aubaine. Elle l'isole, met son téléphone
sur écoute, consulte chaque
document devant lui parvenir,
choisit ses interprètes.
Le 9 septembre
1976, quand il meurt, elle
pense que c'est son moment de
gloire, elle fait venir 10 000
hommes à Pékin, prépare un coup
d'Etat, mais ses adversaires la font
arrêter le 6 octobre. En 1980, elle
est condamnée à mort, puis sa
peine est commuée en prison à
perpétuité. Libérée pour raison de
santé, elle choisit de se suicider,
comme un dernier coup d'éclat.