Les forces en présence
en mai 1940

La drôle de guerre

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L'optimisme de Gamelin

Le 10 mai 1940, à Vincennes, sur le coup de sept heures du matin, le général Gamelin se montre de joyeuse humeur. Du fond de sa « thébaïde », le généralissime a, selon toute apparence, loisir d'être satisfait. Le fracas des chenilles des Panzer sur les pavés des routes belges et hollandaises montre que les Allemands, par un manque d'imagination affligeant, se contentent de rééditer le plan Schlieffen de 1914. Avec la manoeuvre Dyle—Breda, amoureusement fignolée pendant l'hiver, ils vont se heurter à une réplique appropriée...
Le simple énoncé du rapport des forces semble encore justifier l'optimisme de Gamelin. Sur le seul théâtre d'opérations du nord-est, le généralissime dispose de 114 divisions dont 6 de réserve. En cas de nécessité, rien ne l'empêche d'effectuer des prélèvements sur les 16 grandes unités stationnées sur les Alpes ou en Afrique du Nord. Enfin l'attaque allemande aux Pays-Bas et en Belgique nous assure le contact immédiat d'une vingtaine de divisions belges et d'une douzaine de grandes formations hollandaises. Au total, pour répondre au premier choc, les Alliés alignent 146 divisions alors que les Allemands n'en disposent que de 105, dont 16 en deuxième échelon.

Le plan français

Généraux français avant la deuxième guerre mondiale
Les Ardennes sont jugées impénétrables, ou, du moins, on pense avoir largement le temps, si l'ennemi s'y aventure, d'en étoffer la défense. La ligne Maginot est estimée infranchissable. Donc on suppose que, comme en 1914, l'Allemand lancera sa principale offensive avec son aile droite sur la Belgique et la Hollande, cherchant après avoir conquis les ports à envelopper les armées alliées par un vaste mouvement tournant.
En conséquence c'est le long de la frontière belge, particulièrement entre Dunkerque et Longuyon que sont échelonnées les divisions les mieux équioées. Et c'est entre Dinant et Longuyon, face aux Ardennes considérées comme une défense naturelle que le rideau défensif sera le plus léger.
La Belgique attaquée demandera notre aide. Surévaluant les fortifications sur la Dyle et la capacité de résistance de l'armée belge, Gamelin a prévu, pour l'appuyer, de porter sa gauche (G.A.1) en Belgique sur la Dyle et la Meuse, puis de détacher la 7e armée Giraud (la plus forte) vers Breda en Hollande où elle donnera la main aux divisions hollandaises.
En gros la nouvelle ligne alliée serait Rotterdam - Breda - Liège - Sedan - Ligne Maginot. Nom de la manoeuvre : DYLE et BREDA.
La confiance de Gamelin en son plan est telle qu'il n'admettra que le 15 mai que la percée sur Sedan était bien le noeud de l'offensive allemande et non une diversion.

Un vrai coup de faux

Plan initial : Le plan « jaune », établi en octobre 1939 pour une offensive fixée au 12 novembre, correspondait en gros à l'hypothèse de Gamelin. Il reprenait sur une plus vaste échelle le plan Schlieffen de 1914. « Vous faites du Schlieffen », avait dit Hitler peu enthousiaste à son haut commandement. C'est le groupe von Bock qui aurait eu le rôle décisif.
Plan Hitler-Manstein : L'offensive étant ajournée pour des raisons météorologiques, on revoit la question.
Chef d'état-major du croupe d'armées von Rundstedt, le général von Manstein eut l'idée d'une percée par les Panzers dans les Ardennes. Bientôt suivies par l'infanterie elles prendraient à revers les Alliés attendant l'orage face à la Belgique. Un vrai « coup de faux ». Lorsque Manstein eut par hasard l'occasion de lui exposer son plan (que le grand état-major, qui ne voulait pas démordre de son plan original type Schlieffen, avait gardé dans ses dossiers, le trouvant trop risqué, voire insensé), Hitler l'accueillit d'autant plus favorablement qu'il avait songé lui aussi dès novembre à une percée sur Sedan. Mais il l'étoffa singulièrement et multiplia ses chances de réussir en prévoyant une action dans le Nord qui, secondaire dans son esprit, paraîtrait principale à l'adversaire et monopoliserait son attention.
En mars, le Führer imposa son plan : le groupe B von Bock agira en Belgique et en Hollande du sud, attirant ainsi l'aile gauche franco-britannique, et protégeant le flanc droit du groupe A von Rundstedt qui se voit confier le rôle principal : percer entre Namur et Sedan, forcer la Meuse, foncer vers la mer (direction Abbeville), prendre ainsi à revers les armées alliées aventurées en Belgique et en Hollande qui se trouveront encerclées.
Plan d'une audace qui effraya la plupart des généraux (sauf Guderian qui en fut dès le départ un des rares partisans inconditionnels), d'une audace fondée sur la géniale intuition d'Hitler (du moins en 1940) qui sut tout prévoir avec une extraordinaire justesse :
— la force de pénétration d'un corps cuirassé,
— le plan français,
— l'affolement de nos troupes et la désorganisation de nos communications,
— l'absence d'imagination de Gamelin.
Hitler et ses généraux avant la bataille de France de 1940

Deux surprises de taille pour le général Gamelin

Blindés allemands pendant la bataille de France en 1940
Ainsi le dispositif français recèle une inquiétante faiblesse an centre, à l'endroit où l'ennemi a massé plus de la moitié de son infanterie et les trois quarts de ses moyens blindés.
Par ailleurs, une armée est un organisme vivant ; à la structure, à l'anatomie répondent le fonctionnement, la physiologie. C'est ainsi que les chars français, lents et au rayon d'action limité, sont dispersés en une trentaine de bataillons au profit des corps d'armée et que les trois D.L.M. et les trois divisions cuirassées ne soutiennent pas la comparaison avec les divisions blindées allemandes. Les Panzer intègrent la totalité des chars. Avec leurs régiments d'infanterie montés sur véhicules tout terrain, leur D.C.A., leur artillerie, les éléments de génie et les services, elles constituent de petites armées indépendantes capables de se déplacer dans toutes les directions.
Dans le domaine aérien, la dispersion domine encore, alors que les appareils allemands sont groupés en deux puissantes flottes aériennes capables d'impressionnantes concentrations sur des secteurs déterminés.
Ainsi nulle part les forces alliées, uniquement préparées à une bataille défensive rigide, ne sont capables de faire masse et de foncer. C'est le triomphe de l'éparpillement et de la dilution. Bien d'autres lacunes insurmontables vont encore se révéler au cours de l'action : absence de D.C.A. légère, insuffisance des transports, transmissions à peine améliorées depuis 1918.
L'euphorie du général Gamelin sera de courte durée. En moins de trois jours, deux surprises de taille vont s'abattre sur l'armée française. Surprise stratégique d'abord, avec la manoeuvre de l'Ardenne. Surprise tactique enfin, avec la révélation des possibilités matérielles et psychologiques du tandem char-avion.