Paris occupé

L'armistice
le 22 juin 1940

A LA POPULATION PARISIENNE :
Le général Hering, appelé au commandement d'une armée, remet le gouvernement militaire aux mains du général Dentz. Paris est déclarée ville ouverte et toutes mesures ont été prises pour assurer en toutes circonstances la sécurité et le ravitaillement des habitants. Le général d'armée, Signé HERING.
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Le premier geste des Allemands

occupation de Paris, par les Allemands, en juin 1940
Au matin du 14, le premier geste des Allemands est d'enlever les drapeaux tricolores qui flottent au fronton de certains ministères et de les remplacer par le drapeau à croix gammée, ce même drapeau qu'ils déploient au sommet de l'Arc de Triomphe et de la tour Eiffel, où il flottera en permanence.
Une musique militaire prend place à l'Étoile : elle va rythmer le défilé des troupes qui descendent les Champs-Élysées ou l'avenue Foch où, du haut de son cheval, von Briesen salue sans relâche ses hommes de la 30e division. Parfois il leur sourit ou leur fait un geste de sa main blessée pendant la campagne de Pologne : inlassablement, les caméras de l'armée filment la parade, braquant souvent leur objectif sur le visage buriné de leur chef; on le voit sourire et parfois se dresser brusquement sur ses étriers, comme s'il ne pouvait contenir sa joie de vainqueur. Briesen emportera cet exaltant souvenir du triomphe jusque dans les steppes russes où il tombera au cours d'une reconnaissance dans les premières lignes.
La parade terminée, les troupes allemandes qui doivent prendre garnison dans la capitale s'égaillent dans tous les quartiers de Paris. Peu à peu, des habitants sortent de leurs maisons, les plus hardis interpellent les Feldgendarmen qui règlent la marche des unités allemandes dans les rues et les avenues. A quelques carrefours, des Allemands arrêtent leur voiture et par haut-parleurs commentent la situation; les badauds forment cercle : à deux heures devant l'Hôtel de Ville, à quatre heures rue de Flandre, se tiennent ainsi des meetings improvisés. Les Parisiens écoutent en silence, puis s'en vont.

Achats en masse

paris occupé par les Allemands en juin 1940
Le premier soin des occupants est de se livrer à des achats en masse des produits les plus variés: ils disposent d'un cours de change particulièrement avantageux (20 francs = 1 mark) et les Reichskassen­scheine leur fournissent à satiété des billets tout neufs qui partent aussitôt dans les caisses des boutiquiers parisiens, tenus d'accepter les coupures de l'envahisseur.
L'officier interprète de réserve Robert Wallraf, qui connaît bien Paris écrit dans ses Souvenirs d'occupant : Tous les soldats allemands achètent des chaussures. Elles sont très bon marché; quand je vois leur prix, il me semble que je suis un Américain qui, profitant de sa puissance économique, brandit en souriant des billets de mille francs et trouve tout « very cheap ».

L'Elysée, un camp de prisonniers

Dans son ensemble, la population de Paris reste atone devant l'entrée des Allemands dans la ville, frappée par l'immensité d'un désastre dont elle a devant les yeux la preuve la plus affligeante, ces drapeaux à croix gammée qui, partout, ont remplacé le drapeau tricolore.
C'est en pleurant que Jean Hanotaux, le concierge du palais de l'Élysée, l'a vu monter en haut du mât de la résidence du président de la République; il n'y restera d'ailleurs que quarante-huit heures. Pour le moment, les Allemands ont décidé de transformer la cour de l'Élysée en camp de prisonniers français : le soir, huit cents hommes couchent sur le gravier, huit cents soldats français et sénégalais, abrutis, affamés, nourris par les rares commerçants du quartier qui ont gardé leur boutique ouverte. Les Allemands, raconte Jean Hanotaux, acceptèrent de voir les Blancs nourris par les commerçants du quartier, mais ils s'opposèrent à ce que les Noirs reçoivent quoi que ce soit, sous prétexte que ceux-ci achevaient leurs prisonniers. Les Sénégalais erraient, chancelants et gris dans la cour, comme des enfants tristes. A plusieurs d'entre eux, je réussisà glisser un peu de pain...
Drapeaux à croix gammée dans Paris en juin 1940

Ordres et vexations

Les Allemands dans Paris en juin 1940
Les occupants se conduisent en maîtres absolus dans la capitale : dès leur arrivée, ils ont multiplié ordres, ukases et vexations.
Ainsi les Allemands ont observé que les gardiens de la paix sont étrangement myopes : ils semblent ne pas voir les épaulettes des officiers de la Wehrmacht et ne saluent pas ceux qui les portent. Or, en Allemagne, le Schupo doit le salut à tout officier : il en sera de même ici, à Paris. L'ordre en est donné au préfet de police, qui le transmet à Marchand, directeur de la police municipale. Et pendant plusieurs semaines,par groupe de plusieurs centaines, les gardiens ont suivi des leçons de salut sur la voie publique, données par un ancien officier de cavalerie: nos 18 000 gardiens y ont passé!
Leurs armes sont, en outre, contrôlées rigoureusement par les services de la police militaire allemande que dirige le colonel von Langheim, qui s'est arrogé une sorte de droit de regard sur les activités multiples de la police parisienne en tenue.
Deux monuments parisiens seront détruits par explosifs au début de l'été : le bas-relief à la mémoire d'Édith Cavell, l'infirmière anglaise fusillée par les Allemands pendant la Grande Guerre, situé derrière le musée du Jeu-de-Paume, et le monument aux morts de Vincennes, cours des Maréchaux, dont l'inscription a été jugée « injurieuse » pour l'Allemagne.