Les appels de
Pétain et De Gaulle

L'armistice
le 22 juin 1940

18 juin. A Londres, la BBC a diffusé un message du général de Gaulle refusant l'armistice et la fin des combats demandés aux Français par Pétain le 17 juin
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Négociation dans la nuit

Peu avant minuit, le 16 juin, la boucle est bouclée : Albert Lebrun réunit le nouveau ministère en Conseil; beaucoup de ministres sont absents.
La séance est de pure forme : en dix minutes, il est décidé de demander à l'Allemagne ses conditions de cessation des hostilités.
A Baudoin d'agir. Il convoque M. José-Maria de Lequerica, ambassadeur d'Espagne en France.
Minuit trente. Baudouin remet à Lequerica la note manuscrite par laquelle il prie le gouvernement espagnol d'intervenir auprès du gouvernement allemand afin de lui faire connaître la demande du gouvernement français. L'ambassadeur d'Espagne demande au ministre français des Affaires étrangères l'autorisation de téléphoner en clair à Saint-Jean-de-Luz : deux de ses attachés d'ambassade attendent son appel qu'ils répercuteront à Madrid, via Irun. L'autorisation est donnée.
Une heure du matin, le 17 juin. Philippe Pétain est allé se coucher à l'hôtel de la région militaire de la Gironde. Les combats continuent en France, sporadiquement; le commandement est réduit à une totale impuissance. La situation militaire est « désespérée », les troupes françaises continuent leur retraite devant les pénétrations des Panzerdivisionen de l'ennemi, des millions de réfugiés encombrent les routes.
A l'ouest, les blindés ennemis vont atteindre Vire, Le Mans, Granville, Cherbourg, Rennes et Angers; au centre, combats entre Tours et Briare; à l'est, 400 000 hommes luttent encore, qui sont tronçonnés, encerclés, pressés de partout par les Allemands : Bar-le-Duc et Besançon sont menacés!
Deux heures du matin. Baudouin converse avec sir Ronald Campbell, ambassadeur d'Angleterre, qui est venu aux nouvelles; puis avec M. Biddle, chargé d'affaires des États-Unis, l'ambassadeur Bullitt ayant préféré rester à son ambassade de Paris où il a vu arriver les Allemands trois jours avant.
Neuf heures du matin. Baudouin remet au nonce apostolique une demande des conditions d'armistice au gouvernement italien qu'il le prie de transmettre à Mussolini par l'intermédiaire du Vatican.

L'appel de Pétain le 17 juin 1940

L'appel de Pétain le 17 juin 1940
A dix heures, enfin, le Conseil des ministres, le second du ministère Pétain, se réunit sous la présidence d'Albert Lebrun. Il n'y a que deux interventions : Paul Baudouin rend compte de ses activités nocturnes et matinales, le maréchal donne connaissance du projet de message qu'il lira à la radio le même jour à midi. Le président de la République demande que soit ajoutée une phrase, la dernière; Chautemps une demi-phrase, la première.
Les techniciens de la radio achèvent leur mise au point quand, à 12 h 25, le maréchal Pétain entre dans la pièce où, sur une table de bois blanc, ils ont disposé leur micro. Le beau vieillard, au regard bleu, dans les mains duquel s'abandonne un peuple en détresse, frappe par son calme. Il pose son dossier, en aplatit de la main les feuillets, puis, d'une voix légèrement voilée, le nouveau président du Conseil lit son message:
Francais!
A l'appel de M. le Président de la République, j'assume, à partir d'aujourd'hui, la direction du gouvernement de la France. Sûr de l'affection de notre admirable armée, qui lutte avec un héroïsme digne de ses longues traditions militaires, contre un ennemi supérieur en nombre et en armes; sûr que par sa magnifique résistance elle a rempli nos devoirs vis-à-vis de nos alliés; sûr de l'appui des anciens combattants que j'ai eu la fierté de commander; sûr de la confiance du peuple tout entier, je fais à la France le don de ma personne pour atténuer son malheur.
En ces heures douloureuses, je pense aux malheureux réfugiés qui, dans un dénuement extrême, sillonnent nos routes. Je leur exprime ma compassion et ma sollicitude. C'est le coeur serré que je vous dis aujourd'hui qu'il faut cesser le combat.
Je me suis adressé cette nuit à l'adversaire pour lui demander s'il est prêt à rechercher avec nous, entre soldats, après la lutte et dans l'honneur, les moyens de mettre un terme aux hostilités.
Que tous les Français se groupent autour du gouvernement que je préside pendant ces dures épreuves et fassent taire leur angoisse pour n'écouter que leur foi dans le destin de la Patrie.

Le message du nouveau président du Conseil est diffusé sur les ondes de la radiodiffusion nationale à midi :
Dès qu'il est connu, ce texte provoque dans la population civile un immense soulagement, chez les militaires une confusion totale.
S'il faut « cesser le combat », alors il n'y a plus qu'à jeter les armes!
Les Allemands saisissent çà et là en France cette occasion inespérée de jouer sur l'ambiguïté du terme employé par le maréchal; ils se présentent dans certains points encore tenus par nos troupes avec des drapeaux blancs, parlementent et disent aux combattants français :
Arrêtez de vous battre, c'est Pétain qui vous l'a dit. Leur ruse est souvent couronnée de succès auprès de soldats exténués qui ne demandent qu'à croire que le combat est enfin fini!

L'appel de De Gaulle du 18 juin 1940

Quoi qu'il arrive, la flamme de résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas !Ainsi parle le général De Gaulle seul dans les studios de la BBC, au soir du 18 juin 1940, devant le micro que Churchill lui a prêté. Les mots traversent la nuit portés par les ondes, le ton de la voix est décidé, furieux. Le matin même il est arrivé à Londres, révolté par la démission du gouvernement de Paul Reynaud et le discours du maréchal Pétain. De l'autre côté de la Manche, peu nombreux sont les Français qui l'entendent.Tous cependant ont écouté la veille le vieillard de 84 ans qui leur annonçait la capitulation, l'armistice et laissait craindre la prochaine "collaboration ". Plusieurs millions de Français ont déjà pris la route de l'exode, et ceux qui sont restés chez eux n'ont pas l'habitude d'écouter les radios étrangères. Qu'importe ! Comme une traînée de poudre ces mots de révolte et d'encouragement à la lutte contre l'ennemi circulent à travers le pays, message de liberté pour tous ceux qui refusent la honte et le désespoir.
Les premiers partisans se précipitent dès le lendemain pour rejoindre le Général. Le second appel est lancé le 22 juin et se termine par ces mots :« Vive la France libre dans l'honneur et dans l'indépendance !»
Puis vient la proclamation affichée un mois plus tard sur les murs de Londres : « La France a perdu une bataille, mais la France n'a pas perdu la guerre. » Ainsi De Gaulle galvanise ses troupes durant l'été 1940 et jusqu'au combat final. Dans ses" Mémoires", relatant l'événement , le Général écrira :«A mesure que s'envolaient les mots irrévocables, je sentais en moi-même se terminer une vie... A 49 ans, j'entrais dans l'aventure comme un homme que le destin jetait hors de toutes les séries.»
On a coutume de dire que l'Appel du 18 juin fut le signal de départ de la résistance française. Et si les mots d'espoir du Général raisonnèrent longtemps dans la France résistante, son message sur les ondes était aussi l'oeuvre d'un esprit visionnaire :« Cette guerre n'est pas limitée au territoire malheureux de notre pays. Cette guerre est une guerre mondiale. » Le 6 juin 1944 l'histoire lui donnait raison et les forces alliées prenaient pied sur les plages de Normandie.
appel du général de Gaulle du 18 juin 1940
Les cafés sont pleins de soldats qui se sont démobilisés, qui viennent Dieu sait d'où, jouent au billard avec les officiers... L'encombrement des rues est inouï; impossible d'avancer dans le centre de la ville. Sur la route de Tarbes, toujours le défilé ininterrompu dans les deux sens, de voitures de réfugiés et de camions militaires.
A Muret, fief de Vincent Auriol, où nous nous arrêtons un instant, l'euphorie frise l'indécence, la guerre est finie, l'absinthe coule à pleins bords.
Témoignage
A Toulouse, un encombrement inouï.