Les policiers chargent
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les policiers chargent en mai 68

Roland Castro, le responsable prochinois des Beaux-Arts, arrive par la rue de Vaugirard. Il n'est au courant de rien, se joint aux spectateurs et contemple la Sorbonne enveloppée de brume, les pelotons de police et de gendarmerie qui envahissent la place.
Roland voit, juste devant lui, détaler un jeune homme. Cheveux noirs mi-longs coiffés en casque, col roulé sombre, jeans de velours, il a la dégaine d'un lycéen.
Léger dans ses clarks, les chaussures américaines en peau retournée qui font fureur, il s'élance au milieu de la chaussée où la circulation n'a pas été interrompue. Il zigzague entre les voitures, évite une 4L Renault, contourne une camionnette de boucherie qui freine brutalement et s'avance, seul, vers un car de police Citroën, vieillot et noirâtre. Il tient à la main un pavé qu'il balance avec énergie. Le projectile fracasse le pare-brise de droite. L'homme assis derrière s'écroule, le crâne ouvert.
Rapidement, l'épisode est rapporté dans les rangs des forces de l'ordre : un des leurs a été grièvement blessé, il est mourant peut-être. Dès lors, la violence se déchaîne sans frein. Les policiers chargent, dégagent le boulevard Saint-Michel, repoussent les manifestants vers le bas, vers la Seine. Ils matraquent tout sur leur passage, les consommateurs des cafés, les touristes, les cinéphiles qui patientent au guichet des cinémas. Affolés, les passants courent ; aveuglés, ils cherchent refuge dans les bistrots dont descendent les rideaux de fer. L'air est irrespirable, bleuté. Les voyageurs qui émergent du métro à la station Saint-Michel sont en pleurs.

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Mai 68