Des milliers d'enragés
rideau
les enragés de mai 68
Etudiants sur les barricades en mai 68

Alain Geismar est à Nanterre. Il assiste à une réunion des enseignants de la faculté. Le doyen Grappin explique qu'il a été contraint de fermer pour éviter que le sang ne coule. Le secrétaire du SNESup objecte que cette mesure ne supprime aucun des problèmes soulevés par le malaise ambiant. Une secrétaire entre précipitamment, annonce qu'on se bat à Paris, que la Sorbonne est envahie par la police. La réunion est aussitôt levée, et Geismar file au siège de son syndicat. Il réussit à rassembler les membres du bureau et rédige un communiqué appelant les universitaires à la grève générale. Il est vingt et une heure trente. Parallèlement, il cherche à joindre au téléphone le ministre de l'Education nationale, Alain Peyrefitte. Il n'obtient qu'un membre du cabinet et réclame une audience immédiate.
L'homme de quart rétorque aimablement :
« Si vous croyez que le ministre n'a que cela à faire... » La plupart des leaders arrêtés dans la cour de la Sorbonne ont été conduits au commissariat qui occupe les sous-sols de l'Opéra. Bouclés dans des cages grillagées, ils ont tout loisir d'analyser la conjoncture. Sauvageot découvre Cohn-Bendit, qu'il ne connaît guère, et entame avec lui une longue conversation. En aparté, Alain Krivine et Henri Weber, les dirigeants de la JCR, planifient les mobilisations futures.

I. 'espace d'une soirée, les bâtons des « gardiens de la paix » suscitent des milliers d'enragés. La répression, chacun y goûte, même s'il ne l'a nullement cherché. Et les discours des gauchistes sur la société répressive, qu'on écoutait d'une oreille distraite, prennent corps, matière : l'odeur du caoutchouc dur, la consistance du bois épais. Les groupuscules, malgré leur audience croissante, n'avaient pas réussi à dépasser leur propre cercle. L'exceptionnelle sauvagerie des flics remplace les séances d'éducation politique, les cours de formation accélérée.
Sans doute le terrain a-t-il été consciencieusement balisé, miné. Le fond de l'air, depuis le début du printemps, incite au soulèvement. La répression tous azimuts, imbécile, fournit un aliment à la faim d'action.

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Mai 68